• Le mois de janvier consacré à l'Enfant Jésus

     
     

    Le mois de janvier consacré à l'Enfant Jésus

     

    Le mois de janvier consacré à l'Enfant Jésus

     

    Source : Livre "Le mois de janvier consacré à l'Enfant Jésus" par Hallès

     

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    IDÉE DE CETTE DÉVOTION.

    Les raisons qui peuvent nous exciter à cette dévotion se tirent de la convenance et des avantages qu'on y remarque.

    Quant à la convenance, on sait que c'est particulièrement pendant le mois de janvier que l'Eglise célèbre dans ses offices et à la sainte messe les mystères de la sainte Enfance de Jésus-Christ.

    C'est donc nous conformer à son esprit, toujours vrai et agréable à Dieu, que d'honorer ces mêmes mystères par des actes spéciaux de dévotion.

    En outre, les divines Ecritures nous apprennent combien le Seigneur est jaloux des prémices de ses œuvres. Elles en sont la fleur et la partie la plus exquise et par conséquent la plus propre à procurer sa gloire.

    Ainsi il ne manquera pas d'agréer les prémices de la nouvelle année, si nous avons soin de lui en consacrer tout spécialement le premier mois.

    On lit dans l'histoire de Tobie, que pendant que ses compatriotes couraient adorer le veau d'or de Jéroboam, lui, se séparant d'eux, allait rendre ses hommages au vrai Dieu dans le temple.

    Cette conduite du jeune Tobie plut extrêmement au Seigneur.

    Ainsi en sera-t-il des témoignages d'amour que nous donnerons à Jésus pendant ces jours, où tant de chrétiens l'oublient et se jettent, corps perdu, dans les divertissements et les folies du carnaval.

    Il y a un peu plus d'un siècle que l'usage s'est introduit d'honorer la très-sainte Vierge d'une manière toute spéciale pendant le mois de mai. Il est bien plus convenable de rendre un semblable hommage à son bien-aimé Jésus, et de distinguer ce mois de janvier entre tous les autres, en le vouant avec une piété singulière au culte du céleste Enfant.

    A ces raisons de convenance se joint un motif d'intérêt. Celui qui le premier se met à peindre sur une toile, s'approprie par là cette toile.

    De même si c'est l'enfant Jésus qui prend le premier possession de la nouvelle année, il en possédera très probablement toute la suite, et en conséquence, nous aurons le mérite et l'avantage de l'avoir saintement employée tout entière.

    En outre, le Seigneur a révélé en différentes circonstances, et en particulier à sainte Marie-Madeleine de Pazzi et à la vénérable sœur Marguerite de Bona, qu'il récompenserait amplement ceux qui sont dévots à sa sainte Enfance, ce dont nous avons mille exemples dans les Vies des Saints et ce dont j'espère que nous ferons l'heureuse expérience en nous-mêmes.

    Aussi saint Bonaventure nous recommande beaucoup cette dévotion.

    Elle a été depuis pratiquée avec un zèle merveilleux par la vénérable sœur Marguerite citée plus haut, par la servante de Dieu, Elisabeth Bonzi, et par beaucoup d'autres avec un grand succès et avec infiniment de consolation.

      

    Pour en venir maintenant à la manière de pratiquer cette dévotion, il faut d'abord placer dans un endroit convenable et commode une pieuse image, sculptée ou peinte, du saint Enfant, et l'orner le mieux possible.

    Il faut aussi préparer dans une petite cassette un certain nombre de petits billets pliés, sur chacun desquels sera écrit ou imprimé l'un des hommages qui vont être indiqués ci-dessous.

    Il y en a de deux sortes : les uns contiennent la pratique à remplir pendant tout le mois ; les autres, celle qui doit être observée le jour même.

    Avant chaque exercice, les associés se mettant à genoux, tirent leur billet ou pratique pour le jour même ; au commencement du mois, ils en tirent un autre de la première catégorie pour toute la durée du mois.

     

    Quant à l'ordre à suivre pour ces exercices, nous aurons soin de le marquer, en tête du mois.

    De plus, chaque semaine, on tâchera de s'approcher avec ferveur des sacrements de pénitence et d'Eucharistie, et chaque jour, on entendra la sainte messe, et on fera une visite au très-saint sacrement.

    Qu'on prenne garde surtout de se comporter de telle manière pendant tout le mois, qu'on puisse voir qu'il est vraiment celui de l'enfant Jésus, et que nous sommes tout appliqués à l'honorer.

    Nous terminerons par un avis au sujet des considérations. Nous les avons présentées d'une manière fort concise, pour ne pas augmenter le volume et la dépense, tout en laissant la faculté au directeur des exercices de les développer de vive voix. Nous avertissons en outre que pour les exemples cités dans le cours de cet opuscule, nous ne réclamons qu'une foi purement humaine, quand nous parlons de personnes qui n'ont pas été béatifiées ou canonisées par le saint-siége ; car nous faisons profession d'être l'enfant le plus soumis de la sainte Eglise romaine.

      

    ACTES DE VERTU

    A PRATIQUER PENDANT TOUT LE MOIS ET QU'ON DOIT TIRER AU SORT AU COMMENCEMENT MÊME DU MOIS.

    1. Jésus enfant qui veut une Vierge pour sa mère, demande de vous que vous soyez pur dans vos regards, dans vos discours et dans toute votre conduite.

    2. L'enfant Jésus naît et vit dans la pauvreté ; il demande de vous que vous vous restreigniez en fait de dépenses, de parure et de commodités de la vie.

    3. L'enfant Jésus se fait dépendant en toutes choses ; il lui sera bien agréable que vous dépendiez des avis de votre père spirituel pour régler vos récréations, vos occupations et vos dévotions.

    4. L'enfant Jésus se tient dans l'humilité ; il vous apprend à ne point parler et à ne point faire parade de votre personne ni de vos avantages.

    5. L'enfant Jésus souffre mille incommodités ; il désire que vous supportiez sans plainte le froid de la saison et les peines qui peuvent vous survenir.

     6. L'enfant Jésus fuit ses persécuteurs sans ressentiment ; il lui sera agréable que vous cédiez sans contradiction autant qu'il est permis de le faire.

     7. L'enfant Jésus ne cherche que la gloire de son Père ; il veut qu'en tout vous n'agissiez que pour la gloire de Dieu.

     8. Jésus enfant parait dépouillé de toute volonté propre ; vous lui ferez chose agréable de vaincre votre penchant, même pour les choses permises.

     9. L'enfant Jésus se soumet à toutes les dispositions de son Père ; il veut que vous vous abandonniez paisiblement à toutes les dispositions de la divine providence.

     10. L'enfant Jésus s'offre à son Père comme une victime de louange ; il vous apprend à le louer et à le remercier vous-même en toute rencontre.

     11. L'enfant Jésus accueille tout le monde et prie pour tous ; il veut que vous parliez en bien et que vous rendiez service à ceux mêmes pour qui vous n'avez pas de sympathie.

     12. L'enfant Jésus fait et souffre tout pour être agréable à son Père ; il désire que toujours vous pensiez et que vous vous appliquiez à faire son bon plaisir.

     

    AUTRES ACTES DE VERTU A TIRER AU SORT CHAQUE JOUR PAR CHACUN DE CEUX QUI FONT LE MOIS.

    1. Lisez ou faites-vous lire un livre de piété pendant un quart d'heure.

    2. Privez-vous de quelque satisfaction permise, comme de faire la collation, de prendre du tabac, etc.

    3. Donnez en aumône à un pauvre un objet dont il aurait besoin.

    4. Avant de vous occuper de votre besogne, faites le signe de la croix et offrez votre travail au divin Enfant.

    5. En sortant de votre chambre, baisez l'image du saint Enfant, et dites-lui trois fois : mon Jésus, miséricorde.

    6. Tâchez de faire du bien à quelque ami par votre bon exemple et par de bons avis.

    7. Mortifiez votre gourmandise, en ne prenant pas à table ce qui flatte le plus votre goût.

    8. Entendez une seconde messe pour l'âme du purgatoire qui a été le plus dévote envers l'enfant Jésus.

      9. Quand vous entendez sonner l'heure dites : mon Jésus, miséricorde.

     10. Mortifiez la curiosité qui vous porte à regarder des objets dangereux, ou bien à entendre des discours inutiles.

    11. Ne causez de peine à personne, et souffrez en silence si on vous en fait.

    12. Levez-vous à temps et faites l'examen avant de vous coucher.

    13. Faites un acte d'humilité, en marquant plus d'estime pour les autres que pour vousmême.

    14. Si vous entendez faire votre éloge par quelqu'un, dites en vous-même : combien me sont inférieurs du côté des dons de la nature ou de la fortune et qui l'emportent de beaucoup sur moi par leur vertu.

    15. Visitez trois fois l'enfant Jésus, et dites-lui du fond du cœur : mon Jésus, faites que j'apprenne de vous à être doux et humble de cœur.

    16. Renoncez souvent à votre volonté, même dans les choses permises, pour l'amour de Jésus.

    17. Afin de conserver la paix avec le prochain, condescendez à ses désirs en tout ce qui ne peut pas déplaire à Dieu.

    18. Faites du bien à ceux qui vous ont causé du désagrément, vous souvenant que c'est ainsi que le bon Jésus en use à votre égard. 

     19. Si vous, apprenez que le prochain est dans l'affliction, donnez-lui les encouragements que vous souhaiteriez recevoir vous-même en cas semblable. 

    20. Donnez quelque bon avis ou quelque secours à un petit enfant pauvre, pour l'amour de l'enfant Jésus.

    21. Fuyez l'oisiveté, et si vous ne savez que faire, mettez-vous aux pieds de l'enfant Jésus, et dites-lui avec ferveur : apprenez-moi à faire votre volonté, Doce me facere voluntatem tuam.

    22. Si vous êtes tenté de négliger quelque bonne œuvre par dégoût, dites-vous à vous-même et rappelez-vous que Jésus n'a point préparé ses récompenses pour les lâches.

    23. Faites vos bonnes œuvres avec ferveur et non par routine. L'enfant Jésus ne saurait agréer ce qui ne se fait pas pour son amour.

    24. Souffrez patiemment vos afflictions pour l'amour de l'enfant Jésus. Quelque grandes qu'elles soient, elles n'ont aucune proportion avec la récompense éternelle que Jésus vous réserve.

    25. Si vous avez fait peine à quelqu'un, soyez prompt à lui en faire vos excuses.

      26. Gardez-vous avec grand soin de toute faute volontaire, quoique légère. La tiédeur est un sommeil dont l'âme a beaucoup de peine à se réveiller. 

    27. Quand vous entendez profaner le nom très auguste de Jésus, louez-le intérieurement et récitez du moins un Gloria Patri, etc.

    28. Soyez ami du silence, et vous vous tiendrez plus facilement recueilli en Dieu.

    29. Abstenez-vous de parler de la conduite d'autrui et de prêter l'oreille à ceux qui en parlent ; il est rare que cela se fasse sans préjudice pour la charité.

    30. Dans chacune de vos actions, pensez que Dieu est présent, et cette pensée vous sera d'un grand secours pour les bien faire.

    31. Si vous souffrez du froid, dites : l'enfant Jésus en a souffert aussi dans la crèche sans se plaindre.

     

    LE MOIS DE JANVIER CONSACRÉ A L'ENFANT JÉSUS.

    Ier JOUR.

    MOTIFS QUI NOUS ENGAGENT A PRATIQUER 
    FIDÈLEMENT CETTE DÉVOTION.

     

    I. Par les exercices de ce mois, nous pouvons gagner le cœur de Dieu qui a voulu, même par toute sorte de prodiges, nous porter à honorer le saint enfant Jésus. Oh ! combien il nous sera avantageux d'entrer dans ses desseins.

     

    II. Par les exercices de ce mois, nous pouvons acquérir un riche capital de bonnes œuvres. Si la grandeur de Jésus nous humilie, dit saint Bernard, sa petitesse ravit notre amour. Oh ! qu'il est doux de le contempler dans ses anéantissements !

     

    III. Par les exercices de ce mois, nous pouvons mériter la protection du saint Enfant. Il ne se laisse pas vaincre en générosité, et il sera libéral pour ceux qui l'honorent, surtout à une époque où il est si outragé. Oh ! quel grand soutien nous trouverons dans sa bonté !

    Prière.

    Quel bonheur pour nous, ô notre miséricordieux Rédempteur, de pouvoir plaire à si peu de frais a votre Père éternel qui mérite tout notre amour, et en même temps nous concilier, avec votre grâce, votre protection et votre assistance spéciale.

    Oh ! puissions-nous être animés de la même dévotion et du même zèle que tant d'âmes qui vous sont si chères, afin de réussir heureusement dans cette sainte entreprise ; mais notre indignité et notre froideur nous inspirent des craintes. Nous ne devons pas cependant et nous ne devons pas non plus perdre courage ; car votre charité et votre clémence infinie sont là pour ranimer notre confiance.

    Ah ! vous qui voyez notre misère, venez à notre secours dans votre miséricorde, et faites que nous pratiquions saintement et avec fruit le bien que nous avons résolu ; faites que nous employions ce mois de telle sorte qu'il soit véritablement tout à vous.

     

    Et vous, très-sainte vierge Marie, notre mère et notre avocate, soyez notre guide, afin que nous accomplissions ponctuellement et avec persévérance tout ce que nous avons résolu de faire en l'honneur du saint enfant Jésus.

    Exemple.

    Dans la ville de Bona, en Bourgogne, vivait la vénérable sœur Marguerite du très-saint Sacrement, religieuse Carmélite, à l'époque où les Espagnols firent leur entrée en Picardie, pour passer de là en Bourgogne.

    Le saint enfant Jésus lui étant apparu, lui prescrivit de pratiquer certains actes de piété en l'honneur de sa sainte enfance, actes tout à fait analogues à ceux qui sont ici proposés.

    Il lui promit en récompense que la ville ne tomberait point au pouvoir des ennemis.

    La pieuse vierge eut grand soin de se conformer aux ordres reçus du ciel.

    Chaque jour, elle offrit au saint Enfant de pieux hommages et de ferventes prières, exhortant en même temps ses sœurs à mettre toute leur confiance dans leur divin époux.

     

    Cependant l'armée ennemie paraissant dans les environs, toute la ville était dans les gémissements et la confusion.

    Alors le Seigneur lui apparaissant de nouveau, encouragea la sœur Marguerite, et lui révéla le jour et l'heure où les ennemis battraient en retraite et s'éloigneraient de Verdun.

    Marguerite courut en informer la prieure, et l'événement justifia la prédiction.

    Mais l'ennemi revenant de nouveau en Bourgogne, elle recourut aussi de nouveau au saint Enfant, conjointement avec ses sœurs, et de nouveau Jésus lui apparut pour l'assurer de sa protection.

    En effet, tandis que tout le monde pressait la supérieure de sortir du monastère avec ses religieuses, la sœur Marguerite l'en dissuada, en assurant qu'un fétu de paille de la crèche était plus puissant que toute l'artillerie des ennemis.

    Et voilà que tout à coup les ennemis se retirent, et que toute l'armée se débande [Vie de la vénérable Marguerite, en italien).

     

     

    DEGRÉS DE LA SAINTE ENFANCE DE NOTRE SEIGNEUR JÉSUS-CHRIST.

    I. Très-doux enfant Jésus, qui êtes descendu par amour pour nous du sein de votre Père, et qui, en vous faisant homme dans les entrailles de Marie, avez pris la forme d'esclave, ayez pitié de nous.

    R). Ayez pitié de nous,

    Ayez pitié de nous,

     

    O Dieu d'amour. (On répond ainsi à chaque verset ou degré).

     

    II. Très-doux enfant Jésus qui, par le moyen de Marie, avez visité sainte Elisabeth et sanctifié Jean-Baptiste dans le sein de sa mère, ayez pitié de nous.

     

    III. Très-doux enfant Jésus, qui vous, êtes renfermé pendant neuf mois dans le sein de Marie, qui avez enflammé son cœur si pur du feu de votre saint amour, et qui vous êtes offert au Père éternel pour le salut du monde, ayez pitié de nous.

     

    IV. Très-doux enfant Jésus, qui êtes né de la vierge Marie dans une étable, qui avez été enveloppé de pauvres langes, couché dans la crèche sur un peu de foin, annoncé par les anges, visité par les pasteurs, ayez pitié de nous.

     

    V. Très-doux enfant Jésus, qui avez reçu le doux nom de Jésus dans la circoncision, et qui avez été désigné comme notre Sauveur par ce nom et par le sang dont vous l'avez arrosé, ayez pitié de nous.

     

    VI. Très-doux enfant Jésus, qui avez été manifesté aux Mages par une étoile, et adoré par eux entre les bras de Marie, puis gratifié de leurs présents qui consistaient en or, en encens et en myrrhe, ayez pitié de nous.

     

    VII. Très-doux enfant Jésus, qui avez été présenté au temple par Marie, mis entre les bras de saint Siméon et manifesté par la prophétesse Anne, ayez pitié de nous.

    VIII. Très-doux enfant Jésus, poursuivi à mort par Hérode, mené en Egypte avec Marie par saint Joseph et glorifié par la mort des saints Innocents, ayez pitié de nous.

    IX. Très-doux enfant Jésus, exilé en Egypte pendant sept ans, élevé par Marie avec un amour immense ; ô vous qui avez renversé les idoles des faux dieux, ayez pitié de nous.

    X. Très-doux enfant Jésus qui, en revenant d'Égypte à Nazareth, avez souffert tant de fatigues dans le voyage, ayez pitié de nous.

     

    XI. Très-doux enfant Jésus qui, dans la sainte maison de Nazareth, avez vécu soumis à Marie et a Joseph, souffrant la pauvreté et endurant les fatigues d'un pénible travail dans l'atelier de Joseph ; ô vous qui, en même temps, avez donné au monde de grandes preuves de la sagesse et de la grâce qui habitaient en vous, ayez pitié de nous.

    XII. Très-doux enfant Jésus, qui avez été conduit par Marie et par Joseph à Jérusalem, étant âgé de douze ans, vous qu'ils cherchèrent, étant perdu, avec des larmes et des soupirs, et qu'ils retrouvèrent au bout de trois jours dans le temple parmi les docteurs, ayez pitié de nous.

    V. Le Verbe s'est fait chair, alléluia, 
    R. Et il a habité parmi nous, alleluia.

    Prions.

    Dieu tout-puissant et éternel, Seigneur du ciel et de la terre, qui vous manifestez aux humbles, accordez-nous, s'il vous plaît, la grâce d'honorer dignement les sacrés mystères de l'enfance de Jésus votre Fils, afin que les imitant avec soin, nous puissions parvenir au royaume des cieux qui a été promis aux humbles. Par le même Jésus-Christ Notre-Seigneur 

    Ainsi soit-il.

    Verbum caro factum est, alleluia.

    Et habitavit in nobis, alleluia.

    Oremus.

    Omnipolens, sempiterne Deus, Domine Cœli et terrw, qui le revélas parvulis; concède, quœsumus, ul nos sacrosancta Filii lui infantis Jésusmysteria digno honore recolenles, dignaque imitations sectantes, ad Regnum Cœlorum promissum parvulis pervenire valeamus. Per eumdem, etc.

    Cette dévotion des degrés de la sainte Enfance peut se pratiquer utilement le 25 de chaque mois. C'est un excellent moyen de ranimer sa ferveur, et de donner un nouveau gage d'affection au saint enfant Jésus. Cet exercice a été pratiqué avec fruit par un grand nombre d'àmes dévoles à Jésus enfant.

     

    Indulgences.

    Benoit XIII a accordé 25 jours d'indulgence à tout fidèle qui invoque dévotement les saints noms de Jésus et de Marie.

    Le même pontife a accordé 100 jours à ceux qui se saluent mutuellement, en disant d'une part : Loué soit Jésus-Christ ! et de l'autre, à jamais, ou bien dans tous les siècles ; et cela, pour chaque fois qu'on se salue de la sorte.

    L'hommage qu'on doit offrir en ce premier jour à Jésus enfant, consiste a visiter le très-saint Sacrement et à réciter en sa présence cinq fois l'acte d'espérance.

    Le vénérable frère François, Carme déchaussé, voulant encourager un de ses frères dans une circonstance critique, lui dit cette parole qui but tout son effet : Le saint enfant a un cœur si généreux, qu'en voyant le besoin où nous sommes, il ne pourra s'empêcher de nous venir en aide.

     

    Oraison jaculatoire de saint Philippe de Néri.

    O mon Jésus ! combien je désire vous aimer !

     

    Prière.

    Très-miséricordieux enfant Jésus, nous vous rendons les plus vives actions de grâce pour les lumières que vous nous avez accordées ;

    faites-nous la grâce d'en tirer le fruit le plus conforme à nos besoins et à votre très-sainte volonté.

    Daignez maintenir et accroître en nous une véritable dévotion et un tendre amour pour votre personne adorable, afin qu'un jour nous parvenions à vous posséder et a vous bénir à jamais.

     

    Antienne.

    Nous nous réfugions sous votre protection, ô sainte mère de Dieu ; ne méprisez pas nos prières dans nos nécessités, mais délivrez-nous toujours de tout danger, ô Vierge digne de gloire et de bénédictions.

    V. Priez pour nous, sainte Mère de Dieu.

     R. Afin que nous devenions dignes des promesses de Jésus-Christ.

    Prions.

    Préservez, nous vous en prions, Seigneur, cette famille de tout malheur ; vous la voyez prosternée de tout cœur à vos pieds : daignez dans votre clémence la défendre contre les embûches de ses ennemis.

    O Dieu, qui êtes notre refuge et notre force, rendez-vous favorable aux humbles prières de votre Eglise, et accordez-nous la grâce d'obtenir ce que nous vous demandons avec confiance, ô vous qui vivez et régnez dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

    On ajoute ici un Ave Maria pour tous ceux qui font les exercices de ce mois.

    Antiphona.

    Sub tuum prœsidium confugimus, sancta Dei Genitrix, nostras deprecationes ne despicias in necessitatibus, sed a pericults cxmcfis libéra nossemper, Virgo gloriosa et benedicta.

       f. Ora pro nobis sancta, Dei Genitrix. ^. Ut digni effîciamur promissionibus Christi.

     Défende quœsumus, Domine, istam ab omni adversitate famitiam, et toto corde libi prostratam ab hostium propitiùs tuere clementer insidiis.

     Deus, refugium noslrum et virlus, adesto piis Ecclesiœ luœ precibus et prœsta, ut quod fideliter petimus, efflcaciter consequamur. Qui vivis, etc.

     

    A vous, je donne mon cœur, ô doux enfant Jésus, source d'amour. Que l'enfant Jésus nous bénisse, avec Joseph et Marie sa mère immaculée.

    Voyez à la fin de l'ouvrage les Cantiques en l'honneur de Jésus.

    {On suivra la même méthode tous les jours de ce mois).

      

    IIe JOUR.

    NAISSANCE DU SAINT ENFANT JÉSUS.

    I. La très-sainte Vierge étant arrivée de Nazareth a Bethléem, et le temps de ses couches étant venu, elle ne trouva personne pour lui donner l'hospitalité.

    Comment est-il possible qu'on ait laissé échapper une occasion si heureuse ? Ah ! ne négligeons pas de répondre aux inspirations célestes. Notre éternité peut dépendre d'une seule.

    II. Marie, résignée aux dispositions de la divine providence, quitte la ville et se retire avec son époux dans une pauvre chaumière. Voilà le choix de Jésus : la solitude et l'humilité. Trouve-t-il ces dispositions en nous ?

    III. C'est dans cette chaumière que la très-sainte Vierge enfante son cher fils dans un ravissement d'esprit. Oh ! comme ce divin Enfant souffre sur cette paille ! et nous, nous recherchons nos aises, et nous sommes avides de délices.

     

    Prions.

    0 notre très-aimable Seigneur Jésus-Christ, qui, devenu petit enfant pour nous, avez choisi une vile chaumière, écartée de toute habitation, pour venir au monde ; oh ! comme vous m'apprenez bien à fuir le commerce des créatures pour goûter les douceurs de la retraite ! hélas ! que les occasions de péché sont fréquentes au milieu du monde, et qu'il arrive souvent d'y succomber !

    Faites donc que, pour autant que notre état et notre profession le permettent, nous nous tenions soigneusement éloignés de tout rapport inutile avec le siècle. Daignez plutôt nous visiter, vous, Seigneur, par vos inspirations intérieures, et fixer à jamais votre résidence dans notre cœur, en bannissant tout ce qui vous y déplaît, et en l'ornant des vertus qui vous sont agréables.

       Nous nous proposons de vous accueillir avec tout l'empressement possible et de seconder toutes vos inspirations, nous confiant dans cette charité qui vous a porté a vous abaisser si profondément et à souffrir tant d'incommodités dès votre naissance, afin de nous sauver.

     Très-sainte Vierge Marie, obtenez-nous de correspondre ainsi aux grâces de votre cher fils, afin que nous soyons constants dans l'amour et le service que nous lui devons.

     

    Exemple.

    La servante de Dieu, Elisabeth Bonzi de Florence, était extraordinairement affectionnée au doux mystère de la naissance de Jésus-Christ. Elle en considérait les merveilles avec attendrissement, et ne se lassait pas d'en parler, trouvant toute sa consolation à s'en entretenir. Elle avait continuellement dans sa chambre une image de la sainte crèche, et plaçait toujours sur son lit la statue de l'enfant Jésus.

    Ces petites industries l'aidaient, comme elle le disait elle-même, à se rappeler cette paille grossière sur laquelle Jésus fut couché en naissant ; elles étaient comme un foyer qui l'enflammait toujours d'un amour plus ardent pour son bien-aimé.

    Elle appelait ces jours son carnaval, parce que depuis Noél jusqu'à la Purification, elle réunissait dans sa chapelle quelques âmes pieuses, avec qui elle pratiquait divers exercices de dévotion en l'honneur du saint Enfant ; car elle se gardait bien de perdre son temps dans les divertissements et les fausses joies du monde, comme faisaient tant d'autres dames de sa condition.

    Ainsi retirée et cachée aux yeux du siècle, elle s'appliquait à servir son Seigneur, en qui elle trouvait toutes ses délices et goûtait une joie céleste.

    Aussi le divin Enfant la récompensait-il fréquemment par des grâces abondantes.

    Elle consacra de plus une grande somme d'argent pour bâtir en son honneur une magnifique chapelle dans l'église des pères Théatins de Florence.

    Enfin comblée de mérites, elle termina sa carrière par une mort précieuse aux yeux de ce Jésus qu'elle avait toujours tant aimé.

    L'hommage à offrir aujourd'hui au saint Enfant consistera a lui consacrer nos travaux. Nous dirons au commencement de chacune de nos principales occupations : c'est pour l'honneur de Jésus. C'est ainsi que le serviteur de Dieu, frère Benoit, de l'ordre des Carmes, avant de se mettre à son métier pour tisser, faisait toujours l'offrande de son travail au saint Enfant.

    (L'oraison jaculatoire et le reste, comme ci-dessus, à la fin du Ier jour).

     
     

    3ème jour

    LE SAINT ENFANT DANS LA CRÈCHE.

    I. Le saint Enfant se laisse envelopper et emmaillotter par sa mère, comme elle le juge à propos. O Dieu ! et nous qui avons tant de défauts, nous ne souffrons ni dépendance ni règle ! Quelle erreur ! voilà comment nos passions, dépourvues de frein, nous emportent à notre perle.

    II. Marie nourrit Jésus de son lait, et ce lait doit servir à former le sang que Jésus est dans l'intention de verser pour nous. Oh ! combien il nous aime ! mais où est notre reconnaissance ?

    III. Jésus pleure, étroitement serré dans ses langes. Ah ! si nous pouvions voir la laideur de nos péchés et les dommages qu'ils nous causent, quelles larmes nous verserions à notre tour ! On n'y réfléchit pas, et voilà pourquoi on pèche, et on rit.

     

     

    Prière.

    En vous voyant, ômon Jésus, caplif dans vos langes, répandre des larmes amères pour nous, nous devrions tous être émus et attendris, quand même nos cœurs seraient durs comme la pierre. Voilà donc où en est venu votre amour ! Et pourtant il ne rencontre chez nous ni retour, ni reconnaissance ; eh ! que dis-je, reconnaissance et retour ? Hélas ! vous ne recueillez de notre part que des rebuts et des affronts.

    Oh ! oui, vous avez bien sujet d'être triste et de pleurer, mais c'est bien plutôt nous qui devrions nous lamenter et fondre en larmes, en voyant combien nous sommes impitoyables et inhumains envers vous. Ah ! si pour vous consoler, il faut verser, non pas des larmes, mais du sang, le voici ; nous vous l'offrons de bon cœur. Oui, oui, acceptez-le, et, en témoignage de votre acceptation, faites-nous ressentir tant d'amertume et de regret de nos péchés passés, que nous ne cessions plus jamais de les déplorer, et que nous ne négligions rien pour réparer par la pénitence le mal que nous avons commis.

    Recevez ce paiement comme père des miséricordes. Usez aussi de clémence envers les aveugles partisans du monde, afin qu'à l'avenir nous sachions tous contenir nos passions dans le devoir.

    Très-sainte vierge Marie, soyez notre médiatrice pour nous obtenir un si grand bienfait, et vous consolerez ainsi votre Fils.

     

    Exemple.

    La servante de Dieu Marie-Félicie Spinelli, fondatrice des capucines dans l'Ile des Grâces à Venise, était fort dévote au saint enfant Jésus.

    Dans une vision, le divin Enfant daigna la confier tout spécialement à la très-sainte Vierge.

    Placée sous une tutelle si puissante, il est aisé de comprendre quels progrès elle fit dans les voies spirituelles, et quel zèle elle mettait à se mortifier, afin d'être agréable à son Seigneur.

    Or, un jour, après avoir rempli ses devoirs, elle descendit au jardin pour prendre pendant quelques moments un délassement innocent. Pendant qu'elle se promène, tout à coup elle aperçoit le divin Enfant couché par terre, tremblant de froid, et l'entend jeter des cris de détresse.

    Attendrie à cette vue touchante, la pieuse femme courut se jeter à ses pieds, et lui demanda humblement comment et pourquoi il se trouvait là ainsi seul et délaissé ?

    Jésus lui répondit : Parce que je ne trouve personne qui veuille de moi. 

    Elle comprit parfaitement alors avec combien de raison Jésus se plaignait de l'ingratitude et de la dureté de tant d'hommes qui, malheureusement asservis au monde, ne se souciaient aucunement de conserver la grâce de Dieu et de lui être fidèles.

    Elle s'offrit donc à lui avec toute l'affection dont elle était capable, dans la disposition de tout faire et de tout sacrifier pour être uniquement à lui.

    Cette amoureuse offrande plut beaucoup au céleste Enfant ; et pour marque qu'il l'acceptait, il lui fit éprouver à l'instant même tant de douceur et de consolation, qu'on ne pourrait ni l'exprimer ni l'imaginer.

     

     

    L'hommage de ce jour consistera à faire au saint Enfant le sacrifice de quelque mets, en mortifiant la gourmandise par l'abstinence.

    C'est ce que fit le serviteur de Dieu, François Piccolomini, huitième général de la compagnie de Jésus. Dans une maladie où il était consumé d'une soif ardente, déjà il avait reçu le verre des mains de l'infirmier. En ce moment, il s'arrête, et dit au frère : Donnons-le a l'enfant Jésus et faisons-lui ce sacrifice.

    (La prière jaculatoire et le reste comme ci-dessus a la fin du premier jour).

     
     

    4ème jour

    AMABILITÉ DU SAINT ENFANT.

    I. L'incarnat, les traits, le coloris et la douceur de ce cher Enfant sont le dessin et le travail du Saint-Esprit, qui l'a formé afin d'attirer tous les cœurs. Et pourtant, où sont ceux qui aiment Jésus ? Ah ! ou n'y pense pas.

    II. Quand la crèche eût été d'or massif et émaillée de pierres précieuses, nos yeux et nos cœurs, dit saint Cyprien, se seraient fixés uniquement sur ce beau visage, et ils y eussent trouvé toutes leurs délices. Ah ! vraiment, celui-là n'a point de cœur qui n'aime pas Jésus.

    III. Mais c'est surtout le cœur de Jésus qui ne respire que douceur et amour. Le Père éternel lui-même met en lui toutes ses complaisances, et nous, où trouverons-nous le bonheur hors de lui ?

     

    Prière.

    Toutes les beautés terrestres ne sont que vanité, ô mon Jésus ; elles ressemblent à celle de la fleur qui se flétrit et s'évanouit en un jour.

    Mais telle n'est pas la vôtre, car elle ne peut se flétrir, et elle ne nous inspire que dévotion et ferveur.

    Ah ! elles le savent bien, ces âmes fortunées qui, méprisant les beautés mensongères et dangereuses, ont eu dès cette vie la consolation de vous voir et de vous caresser petit enfant, et qui maintenant vous contemplent dans une extase de bonheur au ciel.

    Et nous aussi, nous espérons de votre miséricorde la grâce de parvenir un jour à vous voir et à vous posséder pour toujours dans la céleste patrie.

    Afin de mériter cette félicité, nous nous abstiendrons volontiers d'arrêter nos regards sur les beautés mondaines ; volontiers nous vous sacrifierons la satisfaction que nos yeux pourraient y trouver.

    Il nous suffit de vous voir, vous et votre Père céleste.

    Ah ! rendez-nous dignes d'un si magnifique spectacle, et faites que nous dédaignions toute beauté trompeuse capable de nous séduire et de nous priver du bonheur de vous voir et de vous aimer.

     

    Très-sainte Vierge, qui avez eu la joie de contempler dès ici-bas, pendant tant d'années, cette céleste beauté, et qui maintenant la contemplez de si près dans le ciel, obtenez-nous la grâce d'être admis à l'adorer avec vous pendant toute l'éternité.

     

    Exemple.

    Ce n'est pas une chose nouvelle que Dieu éprouve ses serviteurs fidèles par les tribulations, comme on épure l'or dans le creuset.

    C'est ainsi entre autres qu'il éprouva par une maladie le saint évêque Boniface. Comme le mal s'était déclaré pendant les fêtes de Noël, il en fut très sensiblement affligé, parce qu'il ne pourrait assister aux offices de l'Eglise pendant cette sainte nuit, ni jouir au saint autel de la présence de son Seigneur.

    Or, pendant que résigné aux ordres de la Providence, il s'occupait, étendu sur sa couche de douleur, de ces grands mystères, tout à coup il voit apparaître à ses regards la mère de Dieu, tenant son divin Fils emmaillotté et couvert d'un voile.

    On s'imagine aisément combien il fut consolé de cette apparition ; mais là ne se borna pas la faveur : il voit que la très-sainte Vierge dépose le saint Enfant sur son lit, et celui-ci, dégageant une de ses mains, découvrit son visage et se montra sous un aspect si doux, que les séraphins même en eussent été épris.

    Alors le saint, inondé de consolations, s'écria dans un transport de joie : Ah ! lors même qu'il n'y aurait pas d'autre beauté à contempler au ciel que ce visage béni, toutes les tribulations de cette vie devraient nous paraître légères pour mériter de le voir.

    Plein de reconnaissance pour une faveur si signalée, il s'anima toujours davantage à se rendre digne, par l'exercice des vertus de son état, de jouir à jamais de la douce vue de son bien-aimé Sauveur.

     

    Notre hommage aujourd'hui consistera à porter sur la poitrine l'image du saint Enfant. Serrez-la tendrement sur votre cœur, et baisez-la avec amour à cinq reprises.

    Le père Jean Ruiz, jésuite, grand serviteur de Dieu, la tenait toujours sur son cœur, et il mourut en lui baisant tendrement les pieds.

    (L'oraison jaculatoire et le reste comme ci-dessus à la fin du premier jour).

      

     

    5ème jour

    LES ANGES ANNONCENT LA NAISSANCE 
    DU SAINT ENFANT.

    I. Oh ! quelle grande fêle pour les anges à la vue de Jésus qui, en s'humiliant dans la crèche, répare la gloire de son Père. Oui, celui qui s'humilie procure dans sa personne et dans celle du prochain la gloire de Dieu.

    II. Cette réparation accomplie, les anges publièrent avec transport que la paix venait d'être conclue entre Dieu et les hommes. Malheureux que nous sommes, pourquoi la rompre de nouveau par le péché ?

    III. La paix conclue n'est accordée qu'aux hommes qui ont la bonne et sincère volonté de servir Dieu. Si nous ne le servons pas de bon cœur, nous pourrons bien feindre la paix, mais jamais, non jamais, nous ne la goûterons réellement.

      

     

    Prière.

    Cette paix, ô saint Enfant, sera-t-elle notre partage, à nous pécheurs, qui avons si mal répondu a votre amour ? nos péchés l'ont détruite ; nous l'avons rompue, en nous livrant à l'iniquité.

    Ah ! cette pensée nous couvre justement de confusion et nous perce le cœur au vif. Misérables ! perdre un si grand trésor pour un néant, et pour un néant, nous faire les ennemis du souverain Bien.

    Ah ! vous qui êtes venu en ce monde pour chercher les pécheurs, et qui par vos humiliations et vos souffrances, avez rendu à votre Père céleste la gloire que nous lui avions ravie, en même temps que vous avez procuré la paix sur la terre aux hommes de bonne volonté, daignez nous pardonner.

    Touchés d'un sincère repentir, nous détestons du fond du cœur le mal que nous avons commis.

    Donnez-nous cette paix que le monde ne peut nous donner, et que vous refusez justement aux impies, mais que vous avez promis de répondre avec abondance dans les âmes vraiment pénitentes.

    Que nos larmes et notre repentir nous obtiennent de votre cœur miséricordieux ce trésor si précieux de la paix.

    Faites de plus que pour le maintenir et le garder, nous méprisions la fausse paix des plaisirs du monde.

      

    Très-sainte Vierge Marie, soyez pour nous une médiatrice de paix ; obtenez-nous en le don : mais continuez ensuite a en être la gardienne ; afin que nous le conservions à tout prix, comme il le mérite.

     

    Exemple.

    Saint Guillaume, prêtre et ermite,sachant quelle gloire le saint sacrifice de la messe procure a Dieu, ne se contentait pas de le célébrer ; il y intervenait, autant que possible, et assistait avec le peuple à une seconde messe célébrée par un autre prêtre.

    Or, un jour, que tout absorbé dans sa dévotion, il se trouvait à l'église, occupé à entendre la messe, le saint Enfant parut à ses regards. Son air respirait la charité ; il faisait le tour de l'église, et embrassait tendrement tous les assistants pour leur donner la paix.

    Mais comme l'Eglise est semblable à une aire où le bon grain est mêlé avec le mauvais ; il vit que si d'une part le saint Enfant embrassait les uns avec amour, il s'éloignait au contraire de certains autres avec une vive horreur.

    Surpris de ce qu'il voyait, le saint considérait tout en peine, quel pouvait être le motif de cette différence.

    Le Seigneur le tira bientôt d'incertitude, en lui faisant entendre combien lui était odieuse la malice de ceux qui, vivant dans l'état du péché, ne voulaient pas de sa paix, ce qui l'obligeait à leur refuser ses embrassements.

    Eclairé de la sorte sur le malheur lamentable des pécheurs, le saint ermite en prit occasion de détester toujours davantage le péché, et par une vie humble et pleine de vertus, il s'appliqua à acquérir à tout prix la véritable paix du cœur, en servant Dieu avec perfection.

     

     
     L'hommage de ce jour consistera à réciter, face contre terre, et du fond du cœur, devant l'image du saint Enfant, un acte de contrition.
     
    La servante de Dieu, sœur Félicie Venturi, interrogée par son confesseur, pourquoi elle versait tant de larmes en s'accusant de quelques légers manquements, elle lui répondit qu'elle le faisait à cause de l'horreur que lui inspirait son ingratitude envers le saint Enfant, qui lui était apparu quelques années auparavant.

    (La prière jaculatoire, et le reste comme ci-dessus à la fin du Ier jour.)

     

     

    6ème jour

    LES BERGERS VISITENT LE SAINT ENFANT.

    I. Les premiers appelés à la crèche furent quelques pasteurs qui étaient au voisinage, veillant à la garde de leurs brebis. Tant il est vrai que celui qui désire la grâce de Dieu doit être vigilant dans l'accomplissement de ses devoirs.

    II. Les pasteurs se hâtèrent de se rendre a la crèche, et, en y allant, ils s'excitaient les uns les autres à cette démarche. Dans le monde, on s'invite aussi réciproquement, quand il est question de plaisir ; mais quand il s'agit de faire le bien, quelle froideur !

    III. Arrivés près de la crèche, quelle consolation n'éprouvèrent-ils pas à la vue du céleste Enfant ! C'est ainsi que le ciel récompense celui qui seconde les bonnes inspira lions. Mais pour celui qui les néglige, quel sera son sort ?

     

     

    Prière.

    Oh ! que d'invitations et d'appels nous avons reçus de vous, ô aimable Jésus ! Mais hélas ! que de fois nous avons été sourds à votre voix, et insouciants à répondre à vos inspirations.

    Non contents de nous tenir nous-mêmes ainsi éloignés de vous, nous avons encore détourné les autres de se rendre a votre appel, soit par nos discours, soit par nos exemples.

    Oh ! quel immense préjudice, quel grand dommage nous nous sommes causés par cette conduite !

    Nous eussions trouvé en vous tous les biens, car vous êtes la source de toute douceur et le trésor de nos âmes.

    Mais puisqu'au lieu de nous chasser et de nous punir, vous daignez encore dans votre bonté renouveler les mêmes instances, nous ne voulons plus différer d'un moment, nous ne voulons plus être ingrats, ni courir le risque d'être abandonnés de vous.

    Nous voici donc résolus et tout disposés à vous servir et à vous obéir, quels que soient les ordres et les inspirations qu'il vous plaira de nous donner.

    Attirez-nous doucement à vous par les charmes amoureux de votre grâce et faites qu'en vous obéissant, nous goûtions tant de satisfaction que les autres soient par là déterminés à nous imiter.

    Très-sainte mère de Jésus, ayez à cœur de nous obtenir une si belle grâce, et faites que nous y soyons fidèles.

     

    Exemple.

    L'an 1641, comme on avait représenté, selon la coutume, à l'occasion de la fête de Noël, la sainte crèche de l'enfant Jésus dans différentes maisons et dans plusieurs palais de Naples, et cela, avec beaucoup d'éclat et de magnificence, un pauvre esclave qui était musulman de religion, voulut par curiosité être témoin d'un spectacle qui attirait tout le peuple.

    S'étant donc mêlé à la foule, il entra dans une maison où on allait visiter la sainte crèche.

    Au premier moment, il resta comme immobile à la vue d'objets si nouveaux pour lui.

    Mais voilà que tout à coup le saint Enfant tourne les yeux vers lui, l'appelle et lui fait signe avec la main pour qu'il approche.

    Toutes les personnes présentes furent frappées d'étonnement, en voyant un si grand prodige, et s'empressèrent de faire approcher l'esclave de la crèche.

    Alors le saint Enfant l'instruisit et lui ordonna avec douceur de recevoir au plus tôt le saint baptême, parce qu'il ne devait pas tarder à l'appeler auprès de lui dans le ciel.

    L'heureux esclave obéit. On le trouva parfaitement instruit, bien qu'il eût été jusque là très grossier, et il fut baptisé selon qu'il en avait témoigné un ardent désir.

    A peine régénéré, il tomba gravement malade et fut bientôt réduit à l'extrémité.

    Sa conduite et tous ses discours étaient un objet d'admiration et d'édification extraordinaire pour ceux qui le visitaient.

    C'est ainsi qu'il témoigna sa vive reconnaissance envers le bon Sauveur qui l'avait appelé à lui par tant de prodiges.

    Il demanda donc avec instance et eut le bonheur de recevoir le saint Viatique. Après s'être ainsi tout donné à son Dieu dans la communion, il s'envola plein de consolation vers le ciel pour l'y contempler à découvert.

     

     

    L'hommage d'aujourd'hui consistera à enseigner quelques points de la doctrine chrétienne à une personne ignorante.

    Le serviteur de Dieu, père Martinez, Jésuite, ayant renoncé aux fonctions de prédicateur du roi de Portugal, se dévoua tout entier à l'instruction religieuse des enfants et des ignorants.

    Oraison jaculatoire de saint Philippe de Néri.

    Si vous ne m'aidez, ô mon Jésus, je tomberai infailliblement.

    (Le reste comme ci-dessus à la fin du premier jour.)

     

     

    7ème jour

    LA TRÈS-SAINTE VIERGE DEVANT LA CRÈCHE.

    I. Avec quelle tendresse et quelle sollicitude, la très-sainte vierge Marie n'a-telle pas allaité et gardé son cher Fils ? Voilà comment elle s'emploie pour nous, enfants ingrats. Mais pourquoi correspondons-nous si mal à son amour ?

    II. Cependant elle comparait en elle-même l'étable au ciel, les langes à la gloire, les pleurs à la félicité du Verbe éternel ; et elle se consumait d'amour en présence d'une bonté si incompréhensible. Et nous, quand y pensons-nous ?

    III. Souvent encore, Marie offrait à la Majesté divine, en notre nom et en notre faveur, les larmes et les souffrances de son Fils. Oh ! combien elle désire notre véritable félicité, et nous, nous la négligeons ! 

    Prière.

     

    Quelle belle leçon et quelle grande consolation pour nous, ô saint Enfant, lorsque nous vous considérons dans le sein et entre les bras de votre tendre Mère.

    Cette vue nous apprend à réfléchir combien il vous en a coûté pour nous aimer, et combien vous avez fait et souffert pour nous.

    Ensuite quand nous lui voyons offrir vos larmes et vos souffrances pour nous, nous nous sentons encouragés à espérer, quoique pécheurs, notre pardon et votre grâce.

    Animés de cette confiance, nous sommes donc résolus de fouler le monde aux pieds et d'en mépriser les maximes et les lois, qui sont contraires à vos exemples et a vos enseignements.

    Ah ! par considération pour Marie, et par cet amour que vous lui portez, pour vous avoir gardé avec tant d'affection et de soin, faites que nous ne cherchions plus qu'à vous honorer et à vous servir par reconnaissance pour tant de bontés.

       Et vous, très-douce mère, qui voyez si bien nos misères et nos besoins, exposez-les aux pieds du trône de ses miséricordes, et nous sommes sûrs que, par égard pour vous, Jésus aura pitié de nous.

     

    Exemple.

    Saint Ignace de Loyola fut consacré dès sa naissance au saint Enfant Jésus par sa mère.

    Celle-ci voulut le mettre au monde dans une étable, en mémoire de la naissance de Jésus.

    Aussi fut-il favorisé des grâces les plus signalées.

    Jeune encore, il se laissa éblouir du désir de la gloire mondaine, et embrassa la carrière des armes en Espagne, carrière dans laquelle il laissa un libre cours à ses passions.

    Ayant été blessé mortellement d'un éclat de bombe, il se retira dans son château pour se soigner.

    C'est là qu'il se convertit en lisant la vie de Jésus-Christ et des saints, et qu'il résolut de dire adieu au monde et de se livrer aux exercices de la pénitence.

    L'enfer frémit de cette résolution, au point d'ébranler sa chambre comme par un tremblement de terre ; mais la très-sainte Vierge et son divin Fils ne manquèrent pas de le soutenir et de l'encourager.

    Rétabli de sa blessure, et déjà déterminé pleinement à se donner sans réserve à son Dieu, comme il était la nuit en oraison, la mère des miséricordes lui apparut avec le divin Enfant, et l'anima à exécuter le dessein qu'il avait conçu.

    Ce ne furent là que les préludes des grâces qu'il reçut.

    La très-sainte Vierge s'approchant du nouveau pénitent, déposa le céleste Enfant entre ses bras.

    Ignace étreignit ce divin objet contre son cœur, et, se recommandant intérieurement à sa charité et à sa clémence, il se sentit tout changé et transformé en un homme nouveau.

    Il éprouva les plus tendres sentiments de dévotion, et dès lors s'évanouirent sans retour certaines images dangereuses qui lui étaient restées dans l'esprit par suite de la liberté de ses regards et de ses entretiens dans le siècle.

     

    Mais la grâce la plus rare, sinon la plus précieuse, que la Reine des vierges lui obtint à cette occasion du saint Enfant Jésus, ce fut un don singulier de chasteté qui l'affranchit a l'avenir des aiguillons de la concupiscence.

    Ainsi fortifié par cette apparition céleste, le saint triompha de tous les obstacles et de toutes les considérations humaines ; il se maintint reconnaissant et fidèle envers la Irès-sainte Vierge et envers son divin Fils, s'employant avec tout le zèle possible à procurer leur gloire dans le monde entier.

    Pour hommage de ce jour, nous offrirons avec la très-sainte Vierge en faveur des pécheurs les incommodités que nous aurons à souffrir, par exemple le froid.

    C'est l'avis que le saint Enfant lui-même suggéra à sainte Marie-Madeleine de Pazzi.

    (Récitez l'oraison jaculatoire du 6ème jour. Le reste comme ci-dessus, à la fin du 1er jour.)

     

     

    8ème jour 

    JÉSUS ENTRE LES BRAS DE SAINT JOSEPH.

    I. Lorsque saint Joseph prenait le saint Enfant entre ses bras, il reconnaissait en lui son rédempteur et son Dieu ; aussi avec quel respect et quelle dévotion il le portait ! oh ! que de lumières précieuses nous donne une foi qui est vive !

    II. Le saint reconnaissait dans son Jésus la source de tout bien et le Père des miséricordes ; aussi quel repos et quelle consolation il puisait en lui ! Voilà le véritable appui que nous devons chercher.

    III. En le baisant et en le pressant contre son cœur, Joseph s'attendrissait et se fondait comme la cire devant le feu. Oh ! quelle douceur ! Oui, disait saint François de Sales, le monde entier n'est rien pour celui a qui Jésus est tout.

     

     

    Prière.

    En considérant, ô très-saint Enfant, la dévotion et la tendresse de notre saint Joseph pour vous, nous nous réjouissons et nous nous confondons souverainement tout à la fois.

    Nous nous réjouissons de vous voir servi par lui avec tant d'amour et de zèle ; nous nous confondons de nous trouver si négligents et si ingrats à votre service. Oh ! qu'il a été heureux de profiter si bien de vos dons et de vos grâces, et que nous sommes misérables de ne point les apprécier ou de les négliger comme des insensés !

    En compensation et en réparation de notre honteuse indifférence, ah! daignez accepter l'offrande que nous vous faisons de tous les services et de tous les hommages que vous avez reçus de lui. Faites que désormais notre foi prenne une vie nouvelle, et que mettant en vous tout notre bien, nous n'ayons d'autre souci que de vous plaire et de vous servir. Accordez-nous cette grâce par le soin que saint Joseph a pris de vous, par les services qu'il vous a rendus, et par cet amour trèsardent qu'il vous a porté.

    Et vous, ô Marie, très sainte épouse du glorieux saint Joseph, obtenez-nous d'imiter ses vertus, de jouir de sa protection, et de mériter sa compagnie dans le ciel. Ainsi soit-il.

     

    Exemple.

    Parmi les dévots serviteurs du saint Enfant Jésus et de saint Joseph, il est juste de mentionner ici la vénérable sœur Pudentienne Zagnoni, qui fut favorisée de grâces et de dons si extraordinaires du ciel.

    Un jour, elle vit apparaître son cher saint Joseph, avec l'enfant Jésus entre ses bras.

    Après qu'il le lui eut donné, lui permettant de le caresser et de l'embrasser, l'enfant Jésus lui déclara qu'il la prenait pour épouse, voulant qu'elle vécût du même esprit et de la même volonté, et qu'elle fût entièrement à lui.

    Pudentienne répondit à une grâce si signalée par une vie toute de foi et par un désir toujours plus ardent de plaire à son bien-aimé et de lui rendre tous les services en son pouvoir.

    Quoi qu'elle fit, il lui paraissait pourtant que tout cela n'était rien, et elle rougissait d'elle-même, comme si elle eût été une misérable pécheresse, portant une sainte envie a l'innocence de ces petits enfants qu'elle rencontrait.

    Parvenue au terme de sa carrière, tout enrichie de mérites, son saint avocat lui apparut pour la consoler dans une extrémité où les âmes même les plus saintes ne sont pas sans effroi.

    Il s'approcha de son lit, et lui mit l'enfant Jésus entre les bras.

    Il est impossible d'exprimer de quelle plénitude de consolation le cœur de la moribonde fut inondé, en recevant une visite si précieuse.

    Elle adressait la parole tantôt à son Jésus, tantôt à saint Joseph, et toujours dans les termes de l'affection la plus tendre.

    Les religieuses qui l'assistaient, entendaient les expressions pleines d'humilité et de tendresse qui sortaient de sa bouche ; elles en étaient émues jusqu'aux larmes et saintement embrasées.

    Cependant la mourante, fortifiée par des secours si puissants, multipliait les actes de vertu.

    Enfin elle rendit paisiblement son âme à son Créateur.

     

    Pour hommage, visiter aujourd'hui une chapelle dédiée à saint Joseph, et le prier de nous apprendre la manière d'honorer le saint Enfant en produisant des actes de foi, d'espérance et de charité. C'était la pratique du père Louis Lallemant, jésuite, grand dévot de saint Joseph et grand serviteur de Dieu.

    (L'oraison jaculatoire comme au VIe jour. — Le reste comme au Ier jour.)

     

     

    9ème jour

    CIRCONCISION DU SAINT ENFANT.

    I. La loi de la circoncision ne regardait nullement l'enfant Jésus. Il se soumet, cependant à cette cérémonie si douloureuse. Et nous, d'où vient que l'obéissance nous pèse si fort ? Où est donc l'humilité chrétienne ?

    II. Le saint Enfant se soumet à une opération sanglante, à cause des péchés du monde entier dont il s'est fait caution. Et nous, quelle pénitence faisons-nous pour nos propres péchés ?

    III. Tout délicat qu'il est, le saint Enfant Jésus souffre volontiers le couteau qui le blesse et qui répand son sang innocent. Ah ! confondons-nous, nous qui avons tant d'aversion pour la souffrance.

     

    Prière.

    Sainte Marie-Madeleine de Pazzi, ravie en extase, secria un jour, toute transportée d'étonnement et enflammée d'amour : O bon Jésus, il y a à peine huit jours que vous êtes au monde, et déjà vous me donnez votre sang.

    Ah ! on voit bien ici combien vous aimez nos âmes, et combien il vous tarde de les voir délivrées entièrement du péché !

    Cette circoncision douloureuse que vous avez soufferte, ce sang que vous avez répandu nous l'attestent et nous en assurent.

    Qu'il ne soit donc jamais dit que nous avons perdu courage ou confiance, quel que soit le poids des iniquités qui accable notre conscience.

    Si le sang d'Abel criait vengeance, le vôtre, ô saint Enfant, réclame et exige miséricorde ; il veut notre conversion, et il la sollicite.

    Nous voici donc sincèrement résolus de nous convertir.

    Achevez votre œuvre, et parce sang précieux, lavez et guérissez nos plaies. Pour fruit de votre amour, accordez-nous de commencer une vie nouvelle, chaste et chrétienne, qui édifie notre prochain et qui réjouisse le paradis.

    Très-sainte Vierge, ô vous qui avez consenti, mais avec quelle douleur  à la circoncision de votre tendre enfant, et cela pour notre bien, obtenez-nous la grâce de nous convertir ; obtenez-la aussi à tant de pauvres pécheurs qui en ont besoin.

     

    Exemple.

    A l'époque où saint Dominique était à Rome et y prêchait la pénitence, une pécheresse publique, du nom de Catherine, qui faisait un grand nombre de victimes pour l'enfer, à cause de sa rare beauté, assistait de temps en temps à ses prédications.

    Elle reçut de la main du saint un de ces rosaires qui avait coutume de distribuer, et même elle le récitait quelquefois, sans toutefois renoncer a sa vie scandaleuse. Mais le Dieu des miséricordes daigna lui parler au cœur par un prodige.

    Un soir qu'elle était restée seule, après le repas, il lui apparut sous la forme d'un gracieux enfant qui laissait couler du sang par une blessure.

    Effrayée de cette apparition, cette femme se sentait évanouir, lorsque le saint Enfant lui parlant d'un ton de compassion et de tendresse : il suffit, ma sœur, lui dit-il ; cessez de pécher ; considérez combien vous m'avez coûté.

    Cela dit, Jésus disparut, la laissant pénétrée d'une si vive douleur, qu'elle résolut rie se remettre entièrement entre les mains de saint Dominique.

    Elle alla donc le trouver et lui fit sa confession avec les plus vifs sentiments de contrition.

    Changée dès lors en une autre femme, elle devint l'édification de toute la ville de Rome.

    Elle distribua aux pauvres tout ce qu'elle possédait, et s'enferma ensuite dans une cellule très étroite pour y faire pénitence.

    Enfin, après un temps assez long, elle toucha à son terme, fut visitée sur son lit de mort par la très-sainte Vierge, et expira heureusement dans les bras du Seigneur.

      

     

    L'hommage de ce jour consistera à travailler à la conversion de quelque pécheur, en l'exhortant au bien par de sages discours.

    Vous coopérerez ainsi aux désirs du saint Enfant.

    Il se fit voir un jour à la servante de Dieu, sœur Marie-Anne de Jésus, franciscaine, portant une brebis sur les épaules et tout mouillé de sueur sous son fardeau.

    (La prière jaculatoire du VIe jour. — Pour le reste, voyez la conclusion des exercices du Ier jour.)

     

     

    10ème jour

    JÉSUS ENFANT EST NOTRE MODÈLE.

    I. Le nom de chrétien signifie disciple de Jésus-Christ, et nous oblige à l'imiter. C'est lui et non pas le monde qui doit être notre modèle. Oh ! que nous sommes malheureux si nous prenons le change !

    II. Jésus dès sa naissance méprise le monde avec ses richesses et ses plaisirs. Il aime la retraite, la prière et la charité. Oh ! qu'il trouve peu d'imitateurs !

    III. Au grand jour du jugement, seronsnous du nombre des bénis de JésusChrist ? Ah ! ne l'oublions pas : celui-là ne sera point son compagnon au ciel, qui ne l'aura pas imité sur la terre. Qu'en sera-t-il donc de nous ?

      

     

    Prière.

    Votre crèche, ô notre Sauveur, sera à l'avenir notre école, et vous, vous serez notre maître et notre modèle.

    Si notre nature corrompue et dégradée éprouve de la répugnance à apprendre et à suivre les leçons de vie que vous nous donnez par vos exemples, vous saurez bien nous encourager et nous soutenir.

    Il n'est que trop juste, et il nous importe souverainement de retracer en nous les leçons de pureté, d'humilité, de mortification et de toutes les autres vertus que vous nous avez offertes ; et nous ne pouvons mieux vous témoigner notre estime et notre amour qu'en les suivant.

    Ah ! imprimez dans nos cœurs des sentiments semblables aux vôtres ; affermissez nos résolutions, afin que nous y soyons fidèles a l'occasion. Oui, que votre exemple nous ravisse, et que votre grâce nous inspire de la générosité à votre suite.

    Et vous, très-sainte Vierge, qui fûtes la copie la plus fidèle de votre Fils, failes que nous aussi, nous ayons pour l'imiler un zèle toul pareil au vôtre. Ainsi soit-il.

      

    Exemple.

    La vénérable servante de Dieu, sœur Julie Ciccarelli, de Camerino, conçut, dés l'âge le plus tendre, par une grâce spéciale du Seigneur, une tendre dévotion et un ardent amour pour l'enfant Jésus.

    La charité et les souffrances de ce divin Enfant étaient pour elle comme ce souffle qui excite la flamme ; elles allumaient dans son cœur déjà si bien disposé d'ailleurs, un amour toujours plus ardent. Le Bien Aimé voulant encore accroître ce doux incendie, daigna y jeter lui-même un aliment nouveau, en lui apparaissant sous la forme d'un petit Enfant.

    Un jour donc que Julie se livrait aux élans de sa ferveur, au moment où elle était le plus profondément recueillie, il se présenta tout à coup à ses regards sous les traits d'un enfant très gracieux dont le visage éclatait d'une beauté ravissante. On ne peut ni dire ni concevoir combien elle fut ravie de cette magnifique apparition, et quelle consolation intérieure elle en ressentit.

    Toutefois une circonstance était bien de nature à tempérer sa joie : le tendre Enfant lui apparut chargé d'une croix trèspesante. Elle comprit à l'instant de la manière la plus parfaite, que son céleste maitre voulait lui apprendre à aimer la croix et à l'imiter en la portant avec générosité et promptitude.

    Eclairée par cette vision, il est incroyable combien Julie se sentit encouragée et enflammée du désir de se rendre semblable à son divin Epoux.

    Elle s'attacha à lui par le vœu de virginité, et non-seulement elle se mortifiait dans la nourriture et les autres satisfactions sensibles, mais chaque jour elle imaginait de nouvelles industries et de nouveaux moyens de crucifier sa chair, afin de se rendre toujours plus semblable à son Bien-Aimé.

     

     

    Que votre hommage consiste aujourd'hui à vous priver de quelque satisfaction ou divertissement, même innocent. C'est ainsi que vous commencerez a imiter la mortification du saint Enfant, qui, pour encourager sainte Liduvine, lui apparut attaché à une croix dès l'âge le plus tendre.

    (La prière jaculatoire au vie jour. — Le reste des exercices, comme la fin du jer jour.)

     
     

    11ème jour

    LE SAINT ENFANT REÇOIT LE NOM DE JÉSUS.

    I. On donne au saint Enfant le nom glorieux de Jésus, qui veut dire Sauveur. C'est ainsi que le Père éternel l'exalte par un nom supérieur à tout autre nom, au moment même où il s'humilie si profondément. C'est une vérité infaillible que Dieu exalte les humbles.

    II. Ce grand nom n'appartient qu'à ce divin Enfant ; lui seul a le pouvoir, la sagesse, ia bonté nécessaires pour nous sauver. Malheur à nous si nous n'avions pas eu un Sauveur d'un mérite et d'une charité sans bornes !

    III. Lorsque dans la circoncision, le très-saint nom de Jésus fut prononcé, les anges firent de grandes démonstrations de joie, et l'adorèrent. Ah ! qu'il soit mille fois béni ce nom auguste, qui est toute notre espérance.

     

     

    Prière.

    Votre nom, ô doux enfant Jésus, n'est pas un nom de parade ni vide de sens ; vous l'avez conquis par votre sang et vous ne pouvez vous appeler notre Sauveur, sans l'être en effet.

    Aussi toute notre espérance, notre sécurité résident-elles en vous qui êtes tout-puissant et qui nous aimez avec une tendresse infinie.

     

    Heureux si, pleins de confiance en vous, nous avons soin de nous réfugier dans votre charitable sein parmi nos dangers et nos afflictions, sans nous reposer ni sur les créatures, ni sur nos propres forces.

    O que votre nom est doux, quand on le prononce, qu'il est consolant, lorsqu'on l'invoque, qu'il est puissant, lorsqu'on l'implore !

    Toutefois, entendons-le bien, pour nous sauver, il faut que nous fassions quelque chose de notre côté et que nous n'empêchions pas par nos péchés que le Sauveur ne nous applique les mérites de son sang.

    Ah ! miséricordieux Jésus, sauvez-nous, délivrez-nous de nos péchés et des embûches de nos ennemis ; secourez-nous dans nos besoins, pour que nous soyons toujours fidèles, et qu'ainsi nous parvenions au salut.

    Et vous, ô Marie, notre avocate, en qui nous plaçons toutes nos espérances après Jésus, intéressez-vous à notre salut temporel et éternel, et nous l'obtiendrons.

     Ainsi soit-il.

     

    Prière.

    Le vénérable père François Nolasque, de l'ordre de la Merci, naviguait vers l'Espagne.

    Le navire contenait une multitude de passagers, au milieu desquels il se tenait recueilli dans une pieuse contemplation. Une chose déplaisait au serviteur de Dieu, c'est qu'il ne pouvait point prendre la discipline à son ordinaire. Pendant qu'il priait, retiré à l'écart, pour la conversion des pécheurs, tout à coup les démons tombent sur lui et le criblent à coups de verges jusqu'aux os, puis le serrant par la gorge ils menaçaient de l'étrangler.

    Dans cette détresse, le serviteur de Dieu ne manqua pas d'invoquer le saint nom de Jésus, qui est si terrible à l'enfer.

    Ah ! mon Jésus, s'écria-t-il, pour l'amour de votre saint nom, ne m'abandonnez pas. Faites, mon Jésus, que je puisse louer votre saint nom à jamais.

    Le Seigneur l'exauça, et pour le consoler, il lui apparut sous la figure d'un enfant environné de lumière et ayant pour devise les trois lettres de son saint nom : JHS, Jésus Sauveur des hommes.

    Les rayons de cette lumière céleste mirent en fuite les esprits infernaux.

    Alors Jésus, se tournant vers son serviteur, le consola et l'encouragea en ces termes : Ne craignez pas, vous remporterez de glorieuses victoires par mon nom. A ces mots, il disparut, et François se mit à louer et à bénir avec des transports de joie le saint nom de Jésus.

      

    L'hommage de ce jour consistera à réciter l'acte de contrition, face contre terre, et puis à baiser la terre cinq fois, en répétant avec, dévotion comme ce serviteur de Dieu, pour obtenir la conversion des pécheurs : Mon Jésus, miséricorde !

    Oraison jaculatoire de sainte Catherine de Gênes.

    Jésus, mon amour, non, plus de péché ; mais donnez-moi votre grâce.

    (Le reste, comme à la fin du 1er jour.)

     

    12ème jour

    DE LA DÉVOTION AU SAINT NOM DE JÉSUS.

    I. Aimer ce saint nom, c'est, dit saint Bernard, le moyen de conserver une foi vive ; il est semblable à l'huile qui entretient la lumière. Malheur à nous, si cette lumière nous fait défaut ! O bon Jésus, donnez-nous donc la foi.

    II. L'invocation de ce saint nom, dit encore le saint docteur, calme les passions, et inspire une joie céleste. Voilà donc quel doit êlre notre refuge.

    III. La langue est l'indice du cœur. Voilà pourquoi celui qui aime véritablement Jésus, ne se lasse pas d'invoquer son nom. Saint Paul le nomme jusqu'à deux cent dix-neuf fois dans ses épîtres. Jésus est tout pour nous.

      

    Prière.

    O nom au-dessus de tout nom, nous vous adorons.

    Vous êtes la joie du paradis, la terreur de l'enfer et la consolation des mortels.

    En vous entendant nommer et en vous invoquant, l'affligé sent la joie renaître dans son âme, l'opprimé respire, celui qui chancelle se sent fortifié.

    Oh ! combien nous sommes tristes et affligés de vous voir oublié de tant d'hommes, et même blasphémé par un si grand nombre !

    Nous voudrions, au prix de notre vie et de notre sang, étendre votre gloire en tous lieux, et enflammer toutes les âmes de votre amour.

    Miséricordieux Jésus, nous vous en prions pour la gloire de votre saint nom, ah ! faites que tous nous vous connaissions et vous honorions avec une foi humble et ferme, et que dans nos dangers et nos besoins, nous vous invoquions avec une dévotion et une confiance entière, persuadés que par ce moyen, nous recevrons toujours de votre part assistance et consolation.

       O très-sainte Vierge, vous qui prononciez avec tant de tendresse et de profit le nom de votre Jésus, faites que nous soyons animés pour ce saint nom de la même dévotion qu'un saint Bernardin de Sienne.

     

    Exemple.

    Saint Pierre Paschase, religieux de la Merci, avait une dévotion extraordinaire pour le saint nom de Jésus. Il inculquait à tout le monde, avec un zèle extrême, la sainte coutume de l'avoir souvent dans le cœur et sur les lèvres. Etant allé, selon le but de son institut, jusqu'en Turquie, afin de racheter les pauvres esclaves chrétiens, il fut fait esclave lui-même.

    Réduit à cette misérable condition, il ne laissa pas pourtant de continuer à l'ordinaire, autant qu'il en avait la liberté, de travailler pour le bien du prochain, et spécialement a l'instruction des enfants chrétiens.

    Afin d'entretenir en eux la foi, il s'étudiait à faire pénétrer dans leur cœur la dévotion au très-saint nom de Jésus ; il leur apprenait à l'invoquer avec confiance et amour dans leurs besoins et dans leurs périls, soit temporels soit spirituels.

    Ce zèle fut tellement agréable au Seigneur, que pour lui en montrer sa satisfaction et pour l'encourager de plus en plus, lui-même en personne voulut, sous les traits d'un enfant, s'adjoindre à ceux que Pierre catéchisait.

    Le saint, ne le reconnaissant pas, lui demanda quelles étaient les trois personnes de la sainte Trinité.

    Le saint Enfant répondit avec la dernière précision ; mais en proférant le nom de la seconde personne, il éclaira son serviteur d'une lumière si vive que celui-ci le reconnut aussitôt.

    Il n'est pas aisé de se figurer quelle fut l'impression produite sur le saint, à la vue de tant d'amabilité et d'amour.

    Ce qu'on peut dire, c'est qu'à partir de ce moment, il se sentit animé d'une force et d'un courage tout nouveau, qu'il fit paraître dans la suite en donnant sa vie et en mourant martyr pour le nom de Jésus.

     

     

    L'hommage de ce jour consistera à dire au commencement et à la fin de nos actions, à l'exemple de saint François de Sales : Vive Jésus !

    (La prière jaculatoire du XIe jour. — Le reste des exercices comme au Ier jour.)

     

     

    13ème jour

    LA NAISSANCE DE JÉSUS EST ANNONCÉE 
    PAR UNE ÉTOILE.

    I. Les Mages virent au ciel l'étoile nouvelle qui avait été prédite par Balaam, et ils se sentirent en même temps poussés par une grâce intérieure à chercher le Roi nouveau-né. Oh ! comme Jésus tâche de nous attirer à lui.

    II. Les Mages se mettent en route ; aucune difficulté ne les arrête, parce qu'ils ont confiance en Dieu qui les appelle. Et nous aussi, cherchons Jésus avec une bonne intention, et ne craignons rien.

    III. L'étoile guide les Mages dans leur voie ; mais au milieu de la route, elle disparaît. Ils suppléent à sa lumière en prenant des informations, et ne se déconcertent pas. Non, il ne faut pas abandonner le bien, parce que les consolations feraient défaut. Qui cherche Dieu, finit toujours par le trouver.

      

     

    Prière.

    Nous aussi, ô très-doux Jésus, nous le savons par expérience : Vous tâchez par mille moyens de nous attirer à la vertu et de nous conquérir à votre saint amour ; tantôt c'est par des impulsions et des remords intérieurs, tantôt par des invitations et des attraits extérieurs que vous nous appelez dans votre bonté, ne voulant pas nous voir périr loin de vous.

    Plût à Dieu que nous eussions correspondu, comme les rois Mages ; mais, hélas ! ou bien nous avons été sourds à la voix du ciel, ou bien nous déconcertant à la première difficulté, nous avons abandonné le bien, qu'il serait maintenant si consolant pour nous d'avoir continué.

    Mais, ô Jésus, puisque vous faites encore paraître votre étoile a nos yeux, pour nous inviter à aller à vous, nous voici bien déterminés à vous obéir.

    Fortifiez-nous désormais dans nos épreuves et nos tentations, de telle sorte que jamais plus nous ne perdions courage et ne regardions en arrière.

    Il nous importe en effet souverainement de persévérer, si nous voulons arriver au salut.

     O Vierge sainte et mère de l'espérance, secourez-nous et obtenez-nous le courage nécessaire, afin que nous puissions vivre à l'avenir fidèles à votre divin Fils. 

    Ainsi soit-il.

    Exemple.

    C'est une vérité incontestable que la patience et la persévérance dans le bien nous font recouvrer les consolations spirituelles que Dieu nous retire parfois pour plus de mérite.

    C'est l'expérience heureuse que fit le serviteur de Dieu, le père Emmanuel Sa, de la compagnie de Jésus. Le Seigneur avait coutume de répandre en lui une abondance de douceurs spirituelles, aux fêtes les plus solennelles.

    Animé par cette faveur, le père les célébrait avec une ferveur extraordinaire.

    Or, il arriva une année, qu'à l'approche de la fête de Noël, il se sentait le cœur aride et sec, dépourvu de tout sentiment de dévotion.

    Cela ne l'empêcha pas d'employer tous les moyens pour s'exciter à la ferveur. Il augmenta ses supplications et ses prières ; il prenait la discipline et se mortifiait sans ménagement, afin d'obtenir du Seigneur la lumière qu'il désirait si vivement.

    Cependant les jours se passaient, sans qu'il se vit exaucé, ce qui l'affligeait de plus en plus ; mais il ne perdit pas pour cela confiance, et ne discontinua pas les exercices commencés. Et voilà que, dans la nuit même de Noël, avant qu'on donnât le premier signal pour matines, il entend frapper doucement à la porte de sa chambre.

    Entrez, dit le bon père. Aussitôt, en effet, il voit entrer le saint Enfant avec un air plein de tendresse et d'amabilité : Ah ! père, lui dit-il d'un ton à faire pitié, couvrez-moi parce que je tremble de froid.

    Ce froid servit à allumer dans le cœur d'Emmanuel un véritable incendie d'amour.

    Il courut, afin de jeter son manteau sur l'enfant pour le réchauffer.

    Mais il disparut comme un éclair, et le laissa dans un tel attendrissement, que pendant tout le reste de sa vie, il lui suffisait de penser à cette vision pour que ses yeux devinssent comme deux fontaines de douces larmes.

     
     Comme hommage de ce jour, prendre la résolution d'obéir et de s'humilier le plus possible devant tous nos supérieurs.
     
    Sainte Catherine de Ricci demanda à la très-sainte Vierge ce qu'elle devait faire pour plaire au saint Enfant Jésus.
     
    Marie lui répondit : Ma fille, pour plaire à mon Fils, il faut être humble et obéissant.

    (Prière jaculatoire, voyez au XIème jour. — Le reste des exercices, comme il est marqué au Ier jour.)

     

    14ème jour 

    LES MAGES TROUVENT L'ENFANT JÉSUS.

    I. Les Mages étant partis de Jérusalem, l'étoile leur apparut de nouveau pour diriger leur marche. Ah ! combien Dieu est bon envers ceux qui persistent dans le bien malgré les épreuves, même un peu rudes, qu'ils y rencontrent.

    II. Enfin ils entrent dans la pauvre chaumière. A peine ont-ils aperçu le visage du divin Enfant, qu'il leur semble être transportés au ciel. Oui, voilà uniquement où l'on trouve la vraie consolation.

    III. Qui peut se figurer la satisfaction de la très-sainte Vierge, en voyant ces grands personnages prosternés aux pieds de son Jésus ! Ah ! quand on aime véritablement Jésus, on s'intéresse à sa gloire.

    Prière.

    Très-aimable Jésus, celui qui vous aime sincèrement doit se réjouir de votre gloire et s'attrister des offenses qui vous sont faites.

    Prosternés ici à vos pieds, nous protestons que nous sommes pénétrés de douleur, en voyant un si grand nombre de chrétiens froids et indifférents à votre égard.

    Ah ! nous voudrions verser jusqu'à notre sang pour vous faire connaître et aimer de tous les hommes.

    Et comment donc se fait-il que, méritant l'amour du monde entier, on vous oublie et on vous néglige à ce point, tandis qu'on est tout feu et tout empressement pour le plaisir et la vanité.

    O mon Jésus, par pitié, accordez à tous les hommes la lumière dont ils ont besoin pour connaître que les joies du monde sont trompeuses et qu'elles ne peuvent contenter notre cœur, un cœur créé pour vous seul, son souverain bien et dont vous seul pouvez satisfaire les désirs.

    Que nos pensées et nos affections soient donc toujours tournées vers vous, sans daigner abaisser un seul regard sur les faux biens de ce monde, qui se dissipent comme les ombres et la fumée.

     

    Et vous, ô tendre mère de Jésus, appelez et attirez aux pieds de votre Fils , comme vous savez si bien le faire, tant de pécheurs qui en sont éloignés, faites-leur sentir la différence extrême qui se trouve entre les plaisirs des sens et les douceurs spirituelles, dont Jésus, le bien suprême, est la source intarissable.

    Exemple.

    Anciennement, à Florence, au temps du carnaval, les enfants se livraient à certains divertissements qui d'ordinaire finissaient fort mal et produisaient des résultats fort regrettables. Le saint enfant Jésus sut bien remédier à ce désordre. Il se servit de quelques pieux chrétiens pour persuader à ces enfants de changer leurs travestissements profanes en une fête toute religieuse.

    On ramassa donc avec soin les pièces de théâtre et les livres obscènes, les peintures déshonnêtes, les jeux de cartes, les masques et autres vanités, enfin tous les objets de cette nature : on en fit un grand tas sur la place Notre-Dame, et on mit au-dessus une statue représentant le carnaval.

    Ces préparatifs faits, on réunit tous les enfants, et on les fit marcher deux à deux en bon ordre.

    Quatre d'entre eux portaient sur leurs épaules un bel enfant Jésus en relief sculpté par Donatello, et douze autres soutenaient au-dessus un riche baldaquin, autour duquel, un grand nombre d'autres enfants chantaient ou récitaient des hymnes sacrés.

    Le peuple ne put retenir ses larmes, en voyant s'avancer cette belle procession vers la grand'place.

    On disposa les enfants sur deux haies, et d'un accord unanime, on jeta tous les indignes symboles du carnaval au milieu de la place, et quatre gardiens mirent le feu au bûcher préparé en l'honneur du saint Enfant et pour la confusion de l'enfer.

    Cependant les cloches sonnaient à toute volée, les trompettes et les autres instruments de musique faisaient retentir les airs, et les âmes pieuses chantaient gloire à Dieu.

    L'hommage pour ce jour consistera à adorer le saint Enfant face contre terre et à lui baiser les pieds, au nom des quatre parties du monde, en récitant quatre fois l'acte de charité, à l'exemple de la servante de Dieu, sœur Jeanne de la sainte Trinité, religieuse Carmélite, qui reçut de la très-sainte Vierge elle-même l'ordre d'en agir ainsi.

    (Prière jaculatoire, voyez le XIe jour. — Pour le reste des exercices, voyez à la fin du Ier jour.)

     
     

    15ème jour

    HOMMAGE RENDU AU SAINT ENFANT JÉSUS 
    PAR LES MAGES.

    I. Les Mages n'ont devant les yeux qu'un pauvre enfant qui est dans la misère ; mais une lumière intérieure les porte à l'adorer comme leur Dieu, Et nous, pourquoi sommes-nous si froids dans notre culte envers lui ? Ah ! c'est que nous avons peu de foi.

    II. Les Mages offrent à Jésus de l'encens comme à leur Dieu, de la myrrhe comme à un homme mortel, et de l'or comme à leur roi et à leur maître. C'est ainsi qu'une foi vive se manifeste par les œuvres. Comment doit-on juger de la nôtre, en voyant notre conduite ?

    III. Les dons des Mages passèrent par les mains de la très-sainte Vierge qui les accepta. Apprenons, dit saint Bernard, à user de l'entremise de cette bonne mère pour faire agréer nos offrandes à Jésus.

     

    Prière.

    La foi que nous professons par votre grâce , ô saint Enfant, nous assure pleinement que vous, qui êtes le créateur de l'univers, vous vous êtes fait homme pour nous. Nous vous adorons donc du plus profond de notre cœur, et nous vous reconnaissons avec les Mages pour notre Dieu et notre Seigneur.

    Heureux si, comme eux, nous étions animés de cette foi vive et de cette piété ardente qui vous a été si agréable, et qui a embelli les dons qu'ils vous ont offerts.

    Daignez accepter aussi nos présents, et agréer l'hommage que nous vous faisons de notre pauvre cœur.

    Faites que notre dévotion tienne lieu d'encens pour vous honorer, que l'amour remplace leur or, et qu'au lieu de myrrhe, nous vous offrions une parfaite obéissance a vos commandements, persuadés que ces vertus seront chères à vos yeux.

    Nous devrions déjà, il est vrai, vous avoir offert depuis longtemps ces tributs d'honneur, comme fruits de la foi que vous nous avez donnée ; mais votre bon cœur ne saurait rejeter celui qui désire quoique tardivement réparer sa faute.

     

    Vierge sainte, daignez être la médiatrice de notre offrande. Présentée par vos mains, elle ne peut manquer d'être bien reçue, et d'être agréée de celui qui ne vous refuse rien.

    Exemple.

    Le serviteur de Dieu, père Nicolas Zucchi, de la compagnie de Jésus, un des grands dévots du saint Enfant, se servait de son image pour gagner les âmes à Dieu.

    Un jour, il eut l'occasion d'en offrir une à une jeune demoiselle noble, dont les mœurs étaient pures, il est vrai, mais dont l'esprit fort vif la portait singulièrement a la vanité. Elle reçut le présent avec plaisir, et demanda au père, tout en souriant, ce qu'elle avait à faire de cette image.

    Tout simplement, lui répondit le père, la placer sur votre guitare et l'y laisser.

    La jeune personne prenait grand plaisir à toucher cet instrument, et se livrait souvent et assez longtemps à cette récréation.

    Ayant donc toujours le saint Enfant sous les yeux, il lui arrivait parfois d'arrêter ses regards sur lui, et, à force de le contempler, elle en vint à éprouver un sentiment de dévotion si délicieux, que jamais elle n'avait rien ressenti de semblable.

    Vinrent ensuite de bonnes pensées, avec un certain désir de mener une vie plus chrétienne, si bien que la guitare lui servait plutôt à prier qu'à se diverlir.

    Finalement, elle sentit au fond du cœur une forte inspiration de se consacrer entièrement au saint Enfant et de se faire religieuse.

    Toute pleine de cette résolution, elle alla se jeter aux pieds du père Zucehi, et lui raconta la victoire que le saint Enfant avait remportée sur elle, et comment il avait banni de son cœur tout amour du monde.

    Elle le consulta ensuite, relativement à l'état religieux qu'elle voulait embrasser, et le père, connaissant en elle une vraie vocation, l'encouragea à y être fidèle.

    Cette démarche fil grand bruit et produisit une impression salutaire, d'autant plus que dès son entrée en religion, cette jeune personne s'appliqua tout de bon à devenir parfaite.

    L'hommage de ce jour consistera à incliner la tête, chaque fois que vous prononcerez ou que vous entendrez le saint nom de Jésus. Vous ferez de même au Gloria Patri.

    Le bienheureux Jourdain, de l'ordre de Saint-Dominique, vit un jour la trèssainte Vierge prendre la main du saint Enfant, et bénir ceux qui s'inclinaient en pareil cas.

    (L'oraison jaculatoire du XIe jour. — Le reste, comme à la fin du Ier jour.)

     

    16ème jour

    OCCUPATIONS DU SAINT ENFANT JÉSUS 
    DANS LES LANGES.

    I. Dans le silence de ses langes, Jésus contemple les grandeurs de Dieu son Père, il les admire et les adore avec une ferveur, en présence de laquelle les ardeurs mêmes des séraphins ne sont que glace. Oh ! comme la retraite nous porte vers Dieu !

    II En même temps Jésus se représente les besoins de tous les hommes, et il prie pour tous, en qualité d'avocat universel. Telle est la source de tout le bien que nous possédons. Est-ce que nous pensons à remercier ce cœur généreux ?

    III. Il a aussi sous les yeux les péchés de tous les hommes ; il les pleure, et offre en expiation ses peines et sa vie. Ah ! quand est-ce que nous nous unirons à lui pour les pleurer, et en faire pénitence ?

    Prière.

    Nos besoins et nos péchés vous ont si vivement préoccupé, ô notre doux Sauveur, qu'afin d'y porter remède, vous avez répandu des larmes, et enduré toutes sortes de peines dès votre berceau, et même dès le sein de votre mère. Combien donc nous avons sujet de vous louer et de vous bénir, et combien il est juste que nous ayons confiance dans un avocat si bon et si puissant ! votre père ne peut rien vous refuser, et vous, quel n'est pas l'amour que vous nous portez ?

    Tout cela, il est vrai, ne fait qu'accroître l'énormité de l'ingratitude avec laquelle nous avons répondu a vos bontés.

    Mais ces bontés nous excitent et nous déterminent à nous appliquer dorénavant à la prière, afin d'obtenir lumière et secours dans nos besoins.

    Quant au passé, elles nous engagent à faire pénitence de ces malheureux péchés qui vous ont coûté tant de larmes. Ah ! daignez nous attirer par vos lumières et nous affermir par votre grâce, afin que nous exécutions fidèlement nos bons propos et que nous surmontions toutes les difficultés qui pourraient en entraver l'exécution.

    Et vous, très-sainte vierge Marie, aidez-nous, et obtenez-nous la grâce de consacrer chaque jour un temps déterminé à la prière et à l'exercice de la componction ; obtenez-nous de ne jamais nous dispenser de cette pratique qui nous sera si avantageuse a nous-mêmes et au prochain.

    Exemple

    En l'an 1600, il se passa en Espagne un fait qui montre bien l'extrême désir que le saint enfant Jésus a de sauver les pécheurs.

    La peste s'étendit cette année-là dans une multitude d'endroits du royaume de Valence.

    Or, il y avait alors à Valence un Carme déchaussé, le vénérable père François, qui était venu pour établir une maison de refuge pour les pécheresses converties.

    Dans le grand danger où se trouvait la ville, on recourut aux prières du serviteur de Dieu.

    Celui-ci, après avoir recommandé la chose au saint Enfant, alla un matin trouver le patriarche ; et lui dit que le saint Enfant s'engageait a délivrer la ville de la peste, s'il obtenait du public la maison qu'il demandait pour les converties.

    Le patriarche lui ordonna d'informer de la chose les membres du conseil.

    Ceux-ci setant réunis et ayant entendu la demande du religieux, plusieurs d'entre eux se montrèrent mécontents de sa démarche, parce que, à plusieurs reprises déjà, la maison en question avait été refusée.

    Le religieux, inspiré sans doute d'en haut, ne se déconcerta pas, il alla se présenter en personne, parla en faveur de ses converties, et promit au nom de l'enfant Jésus que la ville serait préservée de la peste dont elle était menacée, si on lui accordait la fondation et la maison.

    Ce fut une merveille de voir le changement qui s'opéra en un instant dans l'esprit de ceux-là mêmes qui avaient été le plus hostiles jusqu'alors.

    On crut à la parole du père.

    Ou lui accorda ce qu'il demandait ; on en prit acte dans les registres publics, à la grande satisfaction des citoyens qui se tinrent assurés dès lors que le fléau ne viendrait pas ravager leur ville.

    Mais voilà qu'on apprend que la peste a éclaté dans les faubourgs et que plusieurs en sont morts. On envoya donc deux députés au serviteur de Dieu pour se plaindre de lui.

    Il les écouta sans se troubler, et les envoya reconnaître les personnes mortes de la peste ; et comme il l'avait dit, on s'assura que c'étaient des étrangers qui étaient venus là avec le germe de la maladie, et selon qu'il en donna une seconde fois sa parole, pas un seul habitant de la ville n'en fut atteint ; la peste ne fil plus de progrès. Un monument authentique a été dressé dans la salle du conseil, en mémoire de ce fait.

     Comme hommage de ce jour, récitez les bras en croix, cinq pater en l'honneur de l'enfant Jésus, pour la conversion des pécheurs, ou tâchez par un autre moyen quelconque de procurer le salut des âmes.

    La très-sainte Vierge apparut un jour à la bienheureuse Hayde, abbesse de l'ordre de Citeaux. Elle, avait entre les bras le saint Enfant qui touchait et caressait un troupeau de brebis, figure des âmes qui lui sont si chères.

    Oraison jaculatoire du vénérable Salvator, 
    de Ville, franciscain.

    O bel Enfant, faites-moi languir d'amour. (Le reste des exercices comme au Ier jour.)

     

    XVIIe JOUR.

    LA TRÈS-SAINTE VIERGE PRÉSENTE JÉSUS 
    AU TEMPLE.

    I. La très-sainte Vierge se dirige vers le temple, pour y offrir son Jésus, et s'y purifier selon la loi. Oh ! comme il est vrai que celui qui est humble se conforme au commun pour ne pas se singulariser, autant qu'il lui est permis.

    II. Qui peut imaginer l'allégresse de Marie, en présentant au Père éternel ce cher enfant ? Qui peut concevoir avec quel amour Jésus lui-môme s'offre à Dieu ? Ah ! apprenons, nous aussi, à nous offrir sincèrement à lui.

    III. L'offrande que Marie présente pour sa purification est celle des pauvres ; mais combien cette offrande surpasse les plus riches en mérite ! Oui, Dieu fait bien plus attention au cœur qu'au don.

     

    Prière.

    O céleste Enfant, ce que vous désirez spécialement dans nos offrandes, c'est le cœur, c'est l'humilité et la dévotion.

    Ah ! nous devons le reconnaître, trop souvent nous avons manqué en ce point, parce que nos offrandes ont été dépourvues de dévotion et de ferveur.

    Hélas ! au lieu de vous plaire, elles ont provoqué votre dégoût, parce qu'elles étaient froides et négligées. Il n'en sera plus ainsi à l'avenir.

    Votre exemple et celui de la très-sainte Vierge nous montrent que l'ardeur même des séraphins n'est pas assez digne de votre grandeur et de votre majesté.

    Nous voudrions donc posséder le cœur et les affections de tous les saints, et vous offrir de la sorte nos œuvres et nos personnes, pour vous honorer et vous plaire, autant qu'il nous serait possible.

    Ah ! daignez unir nos pauvres offrandes au don inestimable que vous faites de vous-même à Dieu. Donnez-leur, par cette union, quelque prix et quelque mérite, afin que par égard pour vous le Père céleste les agrée et les bénisse.

    Auguste Vierge, obtenez-nous des sentiments semblables aux vôtres, pour animer le peu de bien que nous sommes résolus de faire." Ce sera votre gloire de nous associer à votre ferveur, après que nous avons été si longtemps dans la tiédeur.

    Exemple.

    La vénérable sœur Dominique du Paradis, fondatrice du monastère, vulgairement appelé la Croisette, à Florence, où l'on garde encore ses restes sans corruption, naquit à la campagne, et dès ses plus tendres années, elle commença à recevoir des faveurs spéciales du saint Enfant.

    En avançant en âge, sa dévotion pour l'enfant Jésus ne fit que s'accroître ; elle s'étudiait a l'honorer et a lui plaire en toutes choses du mieux qu'elle pouvait.

    Or, après qu'elle eut fondé son monastère, discourant un jour avec ses religieuses de l'offrande que la très-sainte Vierge avait faite de son divin Fils au temple, ce mystère l'absorba totalement en Dieu.

    Elle se retira dans sa cellule, et là s'abîma dans la considération du bonheur extraordinaire du saint vieillard Siméon, qui mérita dans cette occasion, non pas de voir seulement, mais de recevoir entre ses bras le Sauveur du monde.

    Oh ! se disait-elle, si je pouvais avoir ce doux amour entre les bras et le reposer sur mon sein.

    Ah ! venez à moi, Jésus ! Venez à moi, sainte Mère, avec le fruit de vos entrailles.

    Tout à coup, pendant qu'elle se livrait à ces saintes affections, Marie se présente à elle, tenant son doux Fils entre les bras, suivie du saint vieillard Siméon.

    Qui peut dire quels furent les sentiments de Dominique à ce spectacle, mais surtout quand le saint Enfant, arrêtant sur elle des yeux pleins d'amour et de douceur, leva ses petites mains et la bénit.

    La vision disparut alors, et la cellule resta embaumée d'un parfum délicieux.

    Dominique, transportée hors d'elle-même, voulait courir par tout le monastère et inviter ses sœurs à venir adorer Jésus et sa mère ; mais l'Ange du Seigneur l'arrêta et enchaîna la vivacité de son zèle, en lui permettant toutefois de contempler, tout à son aise, l'extrême bonté dont le Seigneur venait de lui donner le gage.

    L'hommage de ce jour consistera à faire un acte d'humilité et à l'offrir à Dieu, en nous considérant comme des pauvres devant lui.

    Une religieuse Carmélite, demandant un jour au saint Enfant quelle était la pratique qui lui était la plus agréable : Soyez humble, lui répondit Jésus.

    (L'oraison jaculatoire, comme au XVIe jour. — Le reste des exercices, comme à la fin du Ier jour.)

     

    XVIIIe JOUR.

    JÉSUS ENTRE LES BRAS DU SAINT 
    VIEILLARD SIMÉON.

    I. En voyant la modestie de Marie, Siméon reconnut sur le champ qu'elle était la mère de son Seigneur. Peut-on de même reconnaître notre foi dans notre manière d'être ?

    II. Touché, jusqu'aux larmes, le saint vieillard prit Jésus entre ses bras, et prostesta que désormais il mourrait content. Ah ! que sera-ce, lorsque nous le verrons au ciel ?

    III. Les vertus qui méritèrent une si grande faveur a saint Siméon, furent la crainte de Dieu, etun ardent désir de voir le Sauveur. Et nous, jusqu'à quel point désirons-nous le voir et craignons-nous de le perdre ?

     

    Prière.

    Quel bonheur pour nous, ô très-aimable Jésus, s'il nous est donné un jour de vous contempler à découvert en paradis ! Cette vue si douce ne sera pas alors une vue passagère, et nous ne serons plus en danger de vous perdre. Nous vous aimerons et nous vous posséderons à jamais, inondés de délices et de consolations inexplicables.

    Ah ! lorsque nous nous demandons quels sont nos mérites pour parvenir à un bonheur si sublime, notre cœur se resserre, et nous tremblons dans la crainte de n'y point atteindre.

    Mais bénie soit votre divine charité qui, en nous cédant ses mérites, a mis entre nos mains le prix de cette gloire, et qui, en nous en inspirant le désir, nous donne le moyen d'y parvenir.

    Ah ! oui, si nous le désirons sincèrement, nous ferons tous nos efforts, afin de le mériter par les vertus qui en sont la condition indispensable.

    Cependant toute notre espérance est fondée sur votre secours ; et votre miséricorde, votre bonté nous animent à l'espérer.

    Et puis votre intercession, ô tendre mère de Jésus, nous console aussi et nous encourage. Oui, nous l'espérons, après cet exil amer, vous nous montrerez votre Fils pour le bénir et le posséder avec vous pendant toute l'éternité.

    Exemple.

    Saint Cajétan de Thienne venait tout récemment de célébrer sa première messe à Rome.

    Jugeant qu'il n'avait pas traité ces mystères sacrés avec toute l'humilité et la ferveur requises, il s'appliquait à avancer dans les voies de la vertu, en employant les moyens qui sont familiers aux saints.

    La vigile de Noël étant venue, il crut qu'il ne devait point perdre une si belle occasion d'obtenir du saint Enfant la grâce qu'il désirait.

    Il alla donc cette nuit là à Sainte Marie-Majeure, où l'on conserve encore de nos jours la sainte crèche de Belhléem.

    Là, recueilli en lui-même, il se mit à contempler la charité et les abaissements du Dieu enfant.

    Tout à coup, il voit devant lui saint Jérôme, dont le corps repose dans la même basilique, et il remarque que le saint docteur, prosterné devant la très-sainte Vierge, la conjurait de lui accorder le divin Enfant pour quelques moments, et de le déposer entre ses bras.

    L'auguste Reine consentit avec bienveillance à cette requête, et prenant dans la crèche le petit Jésus, elle le porta à Cajétan et le mit entre ses bras.

    Celui-ci, tenant dans son sein celui qui était son trésor et son tout, se sentait comme tout embrasé d'amour ; il le serrait contre son cœur et lui baisait les pieds.

    Oh ! de quelles larmes de tendresse il les mouillait ! Il n'eut alors qu'un regret, ce fut de ne pas mourir d'amour, comme il l'eût désiré.

    Dans la suite, quand cette pensée lui revenait, il avait coutume de dire qu'il devait être plus dur que la pierre et le diamant, pour avoir résisté à ce spectacle sans mourir.

    Cependant la faveur que lui avait faite le divin Enfant resta profondément gravée dans son cœur.

    Il quitta la cour pontificale, dont il faisait partie en qualité de prélat domestique du pape Jules III, et il ne songea plus désormais qu'à procurer la gloire du Seigneur, en vivant dans l'humilité et la pratique de la pauvreté apostolique.

    L'hommage de ce jour consistera à entendre la sainte messe à genoux et avec une grande modestie.

    L'enfant Jésus apparut entre les mains du prêtre à la bienheureuse Christine, de l'ordre de Saint-Dominique, pendant qu'elle entendait la sainte messe, et il lui apprit à bien profiter de ce sacrifice de miséricorde.

    (La prière jaculatoire, comme au XVIe jour. — Le reste des exercices, comme à la fin du Ier jour.)

    XIXe jour

    PROPHÉTIE DU SAINT VIEILLARD SIMÉON.

    I. Après mille bénédictions données à Jésus, le saint vieillard dit à sa mère qu'il serait une occasion de salut et de ruine pour plusieurs. En effet, bien que Jésus veuille que tous les hommes soient sauvés, il sera une cause de damnation pour nous, si nous nous opposons à ses desseins.

    II. Il dit en outre à Marie que son divin Fils serait en butte à la contradiction, de la part de ses créatures. Oui, celui qui pèche, s'attaque a Jésus. Quelle cruauté !

    III. Quelle peine dût ressentir la très sainte Vierge, en entendant de quelle manière son Jésus serait traité ! Elle se résigne cependant, et nous apprend ainsi à nous reposer en tout sur cette providence qui règle toutes choses pour notre avantage.

     

    Prière.

    L'expérience ne prouve que trop, ô saint enfant, que selon la prophétie de saint Siméon, vous seriez en butte à la contradiction et aux mauvais traitements.

    Ah ! plût à Dieu que nous-mêmes nous n'eussions jamais manqué à la fidélité et à l'attachement que nous vous devons.

    Nous ne voulons pas que vos grâces et vos souffrances deviennent pour nous, par notre faute, une occasion de ruine, tandis que vous n'avez eu en vue que notre bien et notre salut éternel.

    A l'avenir, vous serez le seul objet de notre amour : vous servir, vous obéir et vous aimer, sera toujours notre unique étude.

    Ah ! daignez oublier et nous pardonner nos infidélités passées ; nous les détestons de tout notre cœur.

    Faites que par votre grâce nous nous efforcions désormais de réparer par notre ferveur le mal que nous avons commis.

    Notre conversion sera votre gloire, et notre salut sera le couronnement de vos desseins miséricordieux.

    Vierge très-sainte, regardez avec amour ces bons désirs, et obtenez-nous la grâce de vous consoler désormais par notre fidélité, si, par le passé, nous avons blessé votre cœur par nos égarements.

    Exemple.

    Parmi les créatures qui ont déchiré de la manière la plus horrible l'âme du Sauveur, de ce bon Sauveur qui désire nous sauver tous, il faut compter une malheureuse religieuse dont parle un célèbre missionnnaire.

    Après avoir commis mille excès, la misérable reçut un malin la communion, et, enlevant de sa bouche la sainte hostie, elle l'enveloppa secrètement dans un mouchoir.

    Elle va ensuite à sa cellule, en ferme la porte, et, poussée par une fureur vraiment diabolique, elle jette le saint Sacrement à terre, et donnant un libre cours à sa rage sacrilège, elle commence à le fouler aux pieds, et à lui prodiguer mille outrages.

    Un attentat si noir aurait, dû faire tomber la foudre sur sa tête ; la mort aurait dû frapper à l'instant cette forcenée.

    Mais non ; elle voit, étendu sur le sol, son Seigneur et son Dieu sous la figure d'un tendre enfant qui était tout meurtri ; et cet enfant, levant les mains vers elle, lui dit d'un ton de pitié et d'amour, ayant les larmes aux yeux : Que vous ai-je fait, pour que vous me traitiez de la sorte ?

    A ces mots, elle rentre en elle-même, elle conçoit I'énormité de son crime et en est saisie d'horreur. Bientôt une vive douleur s'empare de son âme et lui fait verser des torrents de larmes.

    Elle se jette a ses pieds, et lui dit en pleurant et en sanglotant : Ce que vous m'avez fait ? Vous m'avez-trop aimé, ô Dieu de miséricorde. Depuis longtemps j'aurais dû être en enfer, mais vous m'avez soufferte, et maintenant, au moment même où ma fureur était à son comble, au lieu de me perdre, vous ne me témoignez que de l'amour !

    Le changement fut complet ; elle demanda humblement et avec larmes au Sauveur la grâce de commencer une vie nouvelle et de faire de dignes fruits de pénitence. Alors la vision disparut à ses regards, mais elle resta toujours imprimée dans sa mémoire. Cette pauvre âme devint une nouvelle Madelaine, et, depuis, elle fut toujours un modèle vraiment exemplaire de pénitence.

    L'hommage d'aujourd'hui consistera à vous entretenir avec le prochain sur un sujet édifiant ou à raconter quelque trait de vertu.

    La bienheureuse Dorothée de Ferrare, de l'ordre de Saint-Dominique, vit un jour le saint Enfant qui prenait plaisir à se trouver au milieu de ses novices, au moment où elles s'entretenaient de choses spirituelles.

    (L'oraison jaculatoire comme au XVIe jour. —Le reste des exercices comme au Ier jour.)

    XXe jour

    ANNE LA PHOPHÉTESSE DANS LE TEMPLE.

    I. Le saint Enfant voulut consoler cette sainte veuve par sa présence, parce qu'elle avait été constante dans le bien. Soyons nous-mêmes plus fermes dans nos bons propos, et les grâces ne nous manqueront pas.

    III. Anne ne fut point maltresse de ses sentiments envers Jésus. Elle exalta publiquement ses grandeurs et sa gloire. Si nous aimons le Sauveur, parlons-en aussi, parce qu'il n'est pas connu.

    III. Marie et Joseph étaient dans l'admiration des grandes choses qui se disaient de Jésus, et ils quittèrent le temple, pleins de joie. Oh ! si nous nous appliquions un peu plus à connaître les grandeurs de Dieu, quelle admiration et quel contentement nous éprouverions !

    Prière.

    Non, très-aimable Jésus, votre grandeur et votre bonté ne sont pas connues, et voilà pourquoi gi peu d'hommes vous admirent et vous aiment.

    Heureux si nous étions de ce petit nombre, et certes, nous devrions en faire partie, après tant de lumières et d'instructions que nous avons reçues.

    Mais notre inconstance et notre dissipation ont détourné notre vue sur une foule d'objets étrangers, et voilà comment nous avons perdu le fruit de tant de grâces.

    Ah ! qu'il n'en soit plus de même à l'avenir.

    Oui, nous allons, sur les traces de la sainte prophétesse Anne, nous appliquer désormais avec constance et avec assiduité à la prière et à la mortification.

    Nous espérons que par ce moyen nous parviendrons non seulement à vous connaître et à vous aimer vous-même, mais encore à vous faire connaître et aimer des autres.

    Mais ce n'est pas sur nos propres forces que nous fondons cet espoir.  

    Votre charité sera notre appui ; vous-même, vous serez notre force ; car aucun de ceux qui se sont confiés en vous, ne fut jamais déçu dans ses espérances.

    O Marie, prenez à cœur de nous obtenir une si grande grâce de votre cher fils. Elle tournera à son honneur et à sa gloire, en même temps qu'à notre avantage.

    Ainsi soit-il.

    Exemple.

    Le saint Enfant récompense avec beaucoup de libéralité tout ce qu'on fait en son honneur.

    C'est ce qu'on peut conclure de ce qui arriva à Lélius Ubaldini, petit neveu de Léon X, pendant qu'il était encore enfant.

    Ses parents s'étaient transportés avec toute leur famille de Rome à Pérouse.

    La fête de Noël étant venue, ils donnèrent quelque argent à leurs enfants comme étrennes.

    Lélius, au lieu d'en acheter des bagatelles ou des bonbons comme ses frères, alla visiter la crèche chez les capucines.

    Après avoir vénéré le saint Enfant avec une affection et une piété au-dessus de son âge, l'idée lui vint de donner toutes ses étrennes au petit Jésus ; il s'approcha de la crèche, et, croyant n'être point vu, il mit l'argent à côté du saint Enfant, lui disant d'accepter ce peu, puisque pour le moment il n'avait rien de plus.

    Une personne avait tout observé et entendu.

    Elle se hâta d'en informer la bonne mère, qui en fut extrêmement touchée, mais qui dissimula pour lors.

    Tous étant de retour à la maison, elle demanda à chacun de ses fils quel emploi ils avaient fait de leur argent.

    Tous lui en rendirent compte, et, sur sa demande, Lélius avoua qu'il l'avait donné à l'enfant Jésus.

    On ne tarda pas à s'apercevoir des fruits de cette offrande.

    Il commença dès lors à éprouver un si tendre amour pour l'enfant Jésus, qu'il en versait des larmes.

    Devenu ensuite religieux de Sainte-Térèse, il parlait avec tant d'onction et de grâce de son Jésus, surtout pendant les fêtes de Noël, que tous ceux de ses confrères qui l'entendaient, en étaient touchés et enflammés de dévotion.

    Il se distingua entre eux tous par sa vertu, et ce fut certainement en récompense de sa piété envers l'enfant Jésus.

    L'hommage de ce jour consistera à chanter ou a faire chanter un cantique spirituel, ou tout au moins engager le prochain à en apprendre.

    La servante de Dieu, sœur Benoîte Gambarini, capucine, vit plusieurs fois le saint Enfant entrer dans l'infirmerie avec sa sainte mère pendant qu'on y chantait de pieux cantiques pour récréer les malades.

    (L'oraison jaculatoire comme au XVIe jour. — Pour les autres exercices, voyez à la fin du Ier jour.)

    XXIe jour

    JÉSUS POURSUIVI A MORT FUIT EN EGYPTE.

    I. Ce que les mages avaient dit à Hérode lui fit craindre de perdre son royaume ; il combina donc les moyens de faire tomber Jésus entre ses mains. Voilà ce qu'on fait pour un royaume fragile, et que fait-on pour l'éternel ?

    II. Hérode se voyant trompé, résolut de faire périr tous les enfants de Bethléem et des environs en dessous de deux ans. Mais Dieu enjoint à saint Joseph de prendre la fuite. Ah ! si nous avons à cœur de conserver Jésus, fuyons les dangers.

    III. Le voyage est long et incommode; il n'entrevoit que des misères. Oui, mais il s'agit d'obéir a Dieu, et cela suffit. Il part donc aussitôt sans attendre le jour. Est-ce là la conduite que nous tenons ? 

    Prière.

    0 très-doux Jésus, la sollicitude des mondains pour les biens fugitifs de la terre, est une instruction et un stimulant pour nous.

    Elle nous engage à tout faire et à tout souffrir volontiers pour ne pas vous perdre et pour procurer votre gloire.

    Tout n'est rien comparé à vous ; la mort serait même un riche gain, si nous l'endurions pour vous.

    Faites donc que nous n'ayons autre chose à cœur que voire gloire, et que, pour elle, nous fassions et nous souffrions tout ce qu'il vous plaira.

    Que vos ordres soient la règle unique de toute notre vie.

    C'est ainsi que nous ferons mourir notre volonté propre, source de tous les déplaisirs que nous vous avons causés par le passé.

    Que votre main puissante réprime les répugnances de cet amour-propre aveugle, qui ne sait point apprécier nos véritables intérêts, intérêts qui consistent à vous obéir et a vous plaire. Pourvu que vous ne nous abandonniez pas et que vous ne vous éloigniez pas de nous, nous serons toujours contents.

    O notre tendre mère, vous qui, par obéissance aux ordres du ciel, avez fui avec votre époux pour sauver les jours de Jésus, attachez-nous étroitement à son amour, et obtenez-nous une sainte indifférence pour tout le reste. Ainsi soit-il.

    Exemple.

    La soumission aux dispositions de la providence est fort agréable au saint Enfant.

    C'est ce que l'on va voir dans l'histoire d'une enfant nommée Marguerite Allegri, qui depuis mourut en odeur de sainteté à Florence.

    Très-jeune encore, elle gardait auprès de son lit une statue de l'enfant Jésus, et souvent elle s'entretenait avec lui, en pleurant sur les égarements de tant de pécheurs.

    Son père qui n'approuvait pas qu'elle vécût si retirée, lui disait que c'était là vouloir se dessécher et se flétrir, au point de n'être plus bonne à rien.

    En rentrant un jour chez lui, il se montra fâché de ne pas voir Marguerite et demanda où elle était.

    En entendant la voix de son père, celle-ci se tourne vers Jésus, et lui dit les yeux pleins de larmes : Mon Jésus, je voudrais rester toujours près de vous, mais mon père m'appelle.

    Le divin Enfant lui ordonna en termes exprès de se rendre près de son père : Allez, lui dit-il, pensez à moi, aimez-moi, et soyez sûre que je penserai à vous et que je vous aimerai.

    En même temps, il élève la main et lui donne la bénédiction, témoignant ainsi combien lui plaisait cet acte d'obéissance quoique pénible.

    Or, le jour de sa première communion, Marguerite étant ravie en extase, vit la très-sainte Vierge et son cher Fils.

    Celui-ci tenait dans une main un superbe bouquet de fleurs et de l'autre une petite croix. Il lui fit entendre que les fleurs qui lui plaisent le plus sont les vertus, et spécialement l'obéissance, la pureté et le détachement des choses du monde ; il ajouta que, pour les conserver intactes, elle devrait endurer toutes sortes de tribulations, figurées par la petite croix.

    L'enfant obéissante et résignée inclina la tête.

    Depuis, elle souffrit avec beaucoup de patience toutes les traverses auxquelles elle fut soumise, se souvenant toujours des lumières qu'elle avait reçues du ciel.

    L'hommage de ce jour consistera à nous priver de quelque entretien ou divertissement conforme à notre goût.

    Nous imiterons saint Camille de Lellis qui, abandonnant en l'honneur du saint Enfant la vie licencieuse qu'il avait tenue jusque là, s'écriait : Monde, je ne veux plus de toi !

    Oraison jaculatoire de saint Ignace de Loyola.

    O mon Jésus, donnez-moi votre amour et votre grâce, et je ne vous demande rien de plus.

    (Les autres exercices comme au Ier jour.)

    XXIIe jour

    VOYAGE DE JÉSUS EN EGYPTE.

    I. Ce voyage, selon saint Bonaventure, dura plus de deux mois. Oh ! que d'incommodités et de fatigues la sainte famille souffrit dans l'intervalle ! Ah ! non, cette terre n'est pas un lieu de délices, mais de souffrances.

    II. Nos saints voyageurs marchaient, tantôt en méditant en silence, tantôt en conversant pour se consoler et s'encourager. Oui, celui qui possède Dieu dans son cœur, se plaît à penser à lui et a parler de lui.

    III. Cependant, on immolait avec cruauté les pauvres innocents. Leurs parents les regardaient comme perdus et comme malheureux ; mais il n'en était pas ainsi. Quand on a la foi, on n'est pas déconcerté d'avoir à souffrir pour Jésus.

    Prière.

    O très-aimable Enfant, votre tendre corps étant si délicat et si sensible, qui pourra jamais dire ou imaginer tout ce que vous avez eu à souffrir dans le cours d'un voyage si long et si pénible ?

    C'est vous-même qui l'avez voulu, et qui vous êtes fait un plaisir de souffrir de la sorte ; vous avez même désiré de souffrir encore davantage pour notre amour.

    Ah ! voilà la preuve que vous nous aimez en vérité.

    Mais c'est aussi un reproche pour nous, qui sommes si éloignés de vous imiter.

    En effet, nous voudrions vous aimer sans souffrir, et nous nous persuadons que nous voulons vous aimer, malgré notre éloignement pour la mortification.

    Mais qui peut nous éclairer si ce n'est vous ? Qui peut changer nos sentiments, sinon votre grâce ? O tendre père, faites-le, afin que la souffrance ne nous épouvante plus, et qu'au contraire elle devienne pour nous une consolation et une douceur, quand vous nous y soumettiez, et pour autant qu'elle nous sera nécessaire qu'il vous sera agréable.

    0 vous, notre reine et notre dame, qui avez eu tant de part aux souffrances de Jésus, et qui les avez endurées avec tant d'amour, faites-nous aimer les travaux et les peines pour vous être semblables en cette vie, et devenir dans l'autre les compagnons de votre gloire.

    Exemple.

    La vénérable sœur Bernardine de Jésus, Térésienne, avait un attrait tout spécial pour servir les pauvres à l'hôpital ; et plusieurs fois, Dieu la récompensa du bien qu'elle leur faisait.

    Un jour qu'elle était fort recueillie dans la prière, la très-sainte Vierge lui apparut, comme lorsqu'elle fuyait en Egypte avec le saint enfant.

    Bernardine compatissant à leur fatigue et à leurs peines, s'offrit pour les accompagner et pour porter à son tour l'enfant Jésus.

    Marie lui répondit qu'elle n'avait qu'à descendre dans la cour, et qu'elle l'y aurait trouvé.

    Bernardine courut en toute hâte dans la cour, et y vit entrer un enfant extrêmement gracieux, mais tout pâle et tout malade.

    Elle lui demanda où il allait, et l'enfant lui répondit : Donnez-moi quelqu'un pour m'ensevelir.

    La servante de Dieu comprit alors que le saint enfant Jésus voulait être servi et assisté dans la personne de ce pauvre enfant, et qu'il regarderait comme fait à lui-même, ainsi qu'il est dit dans l'Evangile, tout ce qui serait fait en faveur de ce pauvre petit.

    Bernardine ne manqua pas d'en prendre tout le soin possible, et pendant les huit jours que vécut encore ce pauvre petit malade, elle ne cessa de le servir avec autant de prévenance et de piété que si c'eût été Jésus lui-même.

    Elle s'estimait heureuse de souffrir quelque incommodité pour celui qui l'avait tant aimé.

    En récompense, elle reçut le don de la ferveur et du recueillement, au moyen duquel elle s'éleva à un degré éminent de perfection.

    L'hommage de ce jour consistera à se lever de meilleure heure que de coutume, en l'honneur des peines endurées par l'enfant Jésus.

    Puis, si vous vous éveillez la nuit, levez-vous pour adorer et remercier le saint Enfant.

    Le père César de Bus, grand serviteur de l'enfant Jésus, avait coutume de le faire chaque nuit.

    Il lui arriva dans une rencontre de voir apparaître une lumière très-vive qui lui communiqua beaucoup de ferveur et de consolation.

    (La prière jaculatoire du XXe jour. — Le reste des exercices comme au 1er jour.)

    XXIIIe JOUR.

    ARRIVÉE DE JÉSUS EN EGYPTE.

    I. La sainte famille étant arrivée à Héliopolis, elle y fut accueillie, d'après saint Anselme, par les infidèles de ce pays mieux qu'elle ne l'avait été par les habitants de Bethléem. Ne sera-ce pas une honte pour nous chrétiens d'être plus inhumains que les infidèles mômes ?

    II. Dans leur pauvre maisonnette, régnait l'ordre le plus parfait, mais c'était la prière qui faisait leur principale occupation. Et nous, distraits par tant de bagatelles, quand est-ce que nous pensons à Dieu ?

    III. De même que l'Arche renversa l'idole de Dagon chez les Philistins ; de même la présence de Jésus fit tomber toutes les idoles de l'Egypte par terre, comme le rapporte sain ! Epiphane. Ah ! si nous recevions dignement Jésus dans la communion, nos vices seraient bientôt détruits.

    Prière.

    O divin Enfant, nous sommes heureux de vous voir si bien accueilli en pays étranger et par une nation infidèle. Mais cet accueil nous confond, en nous faisant voir que, nous chrétiens, nous manquons plus souvent à votre égard de respect et d'amour que ceux qui ne vous connaissent pas et ne vous adorent pas.

    Ah ! malheureux, peut-être qu'au jour du jugement, nous serons jugés et condamnés à cause de notre froideur à votre service, pendant que nous sommes tout feu et tout empressement pour le monde et la chair !

    Comprenons donc une bonne fois quelle est la cause de ce désordre, et quel remède il convient d'y apporter.

    Il provient de notre manque de foi, et le premier comme le plus efficace remède à ce mal, c'est la prière.

    lnspirez-nous donc un zèle tout nouveau pour la prière, ô Jésus, et faites qu'elle soit notre refuge et notre consolation dans nos travaux et nos peines. Ainsi nous nous sentirons toujours pourvus de force et de secours pour bien remplir les devoirs de notre état et pour vous plaire.

    Auguste Vierge, qui, de concert avec votre saint Epoux, avez toujours été appliquée à la vertu et au travail, apprenez-nous à détester l'oisiveté et la dissipation, qui sont le partage des mondains, et obtenez-nous la grâce de vous imiter.

    Exemple.

    La vénérable sœur Anne de Saint-Barthélemi, étant infirmière, avait une malade qui éprouvait une telle répugnance pour les aliments que leur vue seule lui causait des nausées.

    Un jour la charitable infirmière, y ayant mis toute sa science pour lui préparer un mets capable de réveiller son appétit, prend le plat entre ses mains, et se dirige vers l'escalier conduisant à l'infirmerie.

    En montant la première marche, elle est prise d'une telle défaillance qu'elle n'a pas la force d'aller plus loin.

    Elle recourut donc au Seigneur, et implora son secours.

    Ayant ensuite levé les yeux, elle aperçoit, au haut de l'escalier, son bien-aimé Jésus tout éclatant de lumière, qui l'invite à monter.

    A peine eut-elle entendu l'invitation, qu'elle se trouva au haut de l'escalier, aux pieds de son Seigneur.

    Le Seigneur l'accompagna jusqu'auprès de la malade, et, s'étant mis à côté d'elle, il dit à Anne de laisser là son plat et d'aller servir les autres malades, parce que lui-même voulait aider celle-ci.

    Anne obéit, et bien qu'épuisée, elle se sentit assez de force pour remplir son office.

    Cependant la première malade mangea avec grand appétit tout ce qu'on lui avait préparé.

    La servante de Dieu ne trouva pas un moment pour retourner auprès d'elle ; et lorsqu'elle y retourna, Jésus avait disparu.

    La malade était fort contente, et elle remercia son infirmière de tant d'attention.

    Anne changea la conversation par humilité, et lui demanda seulement, si personne n'était près d'elle pendant qu'elle mangeait.

    Personne, lui répondit la malade ; mais je me suis sentie fortifiée si bien que je me crois guérie.

    En effet, elle avait recouvré la santé, comme la recouvrèrent en même temps les quatre autres malades qui se trouvaient alors à l'infirmerie.

    Telle fut la récompense que le Seigneur accorda aux soins de la charitable infirmière.

    L'hommage de ce jour consistera à offrir quelqu'aliment au saint Enfant dans la personne d'un pauvre.

    Nous imiterons ainsi ce pieux enfant de sainte Térèse qui pratiquait l'abstinence pour faire l'aumône ; en se disant a lui-même : Ceci est la part du saint enfant Jésus.

    (La prière jaculatoire comme au XIIe jour. Le reste des exercices comme au Ier jour.) 

    XXIVe JOUR.

    SEJOUR DE JÉSUS EN EGYPTE. 1

    I. Saint Joseph soutint sa famille du produit de son travail ; la très-sainte Vierge de son côté s'appliquait à l'entretien de la maison, et veillait à la garde du saint. Enfant. Et nous, comment, employons-nous ce temps ? sommes-nous amis du travail ?

    II. Le saint Enfant grandissant, sa Mère le revêtit d'habillements qu'elle-même avait confectionnés, et quand elle l'eut sevré, elle le nourrit de ses propres mains. Pensons-nous à revêtir et à nourrir Jésus dans la personne des pauvres ?

    (I) En ce jour commence la neuvaiine préparatoire à la fête de la purification de la sainte Vierge. On trouvera cette neuvaine à la fin de l'ouvrage.

    III. Quelle consolation pour Marie, dit saint Bernardin, de s'entendre dire par Jésus : ma mère ! et de le voir venir vacillant et joyeux se jeter entre ses bras ! Quelle bonté il nous témoigne quand il vient à nous !

    Prière.

    O céleste Enfant, je me figure vous voir vous dirigeant d'un pas incertain vers votre divine Mère pour l'embrasser.

    Je me figure vous entendre l'appeler du doux nom de mère, et cette pensée me procure une joie qui me ravit.

    Que ressentit donc le cœur de Marie, en vous voyant et en vous entendant, elle qui n'avait d'amour que pour vous et qui vous aimait avec une tendresse ineffable ?

    Oh ! qu'elle a été heureuse de profiter de jour en jour par sa fidélité, et de se rendre digne par là de dons et de grâces toujours plus précieuses.

    Mais heureux nous-mêmes, si, lorsque vous daignez nous visiter dans la sainte communion, nous vous y recevons avec piété et amour.

    Oh ! alors, vous ne manquez pas de nous faire éprouver cette paix intérieure et cette joie céleste qu'on ne peut exprimer, et qui ne peut même se concevoir, quand on ne l'a pas expérimentée.

    Ah ! très-doux Jésus, disposez-nous à en faire l'heureuse expérience, en nous rendant amères et insipides toutes les vaines joies du monde, qui est votre ennemi.

    Et vous, ô bienheureuse Vierge qui, pleinement satisfaite de votre Jésus, vous êtes totalement dépensée pour lui, obtenez-nous la grâce de mettre et de trouver en lui toute notre félicité, en attendant que nous allions le voir et le remercier au ciel

    Exemple.

    Saint Antoine étant venu se fixer à Padoue, fut reçu par un seigneur chrétien dans son palais, et là on lui donna une chambre à l'écart, éloignée du bruit, pour qu'il y fût plus tranquille.

    Dès qu'il y fut, le saint qui n'aimait pas a perdre le temps en conversations inutiles, se mit aussitôt en prière.

    La nuit survint, et le maître de la maison venant par hasard à passer de ce côté-là, fut très surpris de voir sortir par les fentes de la porte une lumière très vive.

    Il s'approche pour voir d'où pouvait venir cette lumière, et aperçoit, au travers des fentes, au-dessus d'un livre qu'Antoine tenait ouvert devant lui, le plus beau et le plus brillant enfant qu'on puisse se figurer.

    C'était Jésus lui-même qui, se jetant au cou de son serviteur, l'embrassait et le serrait tendrement.

    Antoine, tout embrasé d'amour, l'embrassait aussi très-étroitement.

    Le saint Enfant informa Antoine qn'il était observé par ce pieux seigneur, et qu'il le payait ainsi très généreusement de sa bonne hospitalité.

    C'est pourquoi Antoine lui permit de jouir de cette vision céleste jusqu'à ce qu'enfin le saint Enfant disparut.

    Ayant alors ouvert la porte, il le conjura avec les plus vives instances de ne point révéler à qui que ce fût, jusqu'après sa mort, ce dont il avait été témoin.

    Le seigneur s'y engagea et tint parole, mais aussitôt après la mort du saint, il fit tout connaître et attesta la vision avec serment.

    L'hommage de ce jour consistera à demeurer une heure ou deux en silence et en retraite, en nous recueillant devant Dieu.

    La servante de Dieu, sœur Jacqueline de l'Aquila, religieuse franciscaine, après un silence rigoureux de neuf ans, mérita d'être visitée par le saint Enfant, en compagnie de sa très-sainte Mère.

    (L'oraison jaculatoire comme au XXIe jour. — Le reste des exercices comme au Ier jour.)

    XXV JOUR.

    RETOUR DE L'ENFANT JÉSUS DE L'ÉGYPTE.

    I. Hérode étant mort, l'Ange du Seigneur ordonna à saint Joseph de quitter l'Egypte avec Jésus et Marie, et tous trois s'empressèrent d'obéir. Notre règle est-elle la volonté de Dieu ou bien notre caprice ?

    II. Les saints voyageurs se mettent en route, dépourvus d'argent et de provisions. Ah ! apprenons à pratiquer la mortification dans le cours de notre pèlerinage mortel.

    III. Saint Joseph ayant appris qu'Archélaus régnait en Judée, en conçut de la crainte, et Dieu l'avertit dans la prière de se retirer en Galilée. Oui, Dieu veut que nous craignions et que nous évitions les méchants.

    Prière.

    0 Maître infiniment sage, nous vous avons fait une grande injure, en ne suivant pas vos exemples, tandis que vous vous êtes abaissé si profondément pour nous enseigner le vrai chemin du bonheur.

    Vous avez pris pour règle la volonté de votre Père toujours droite et toujours aimable ; voilà pourquoi vous avez aimé la mortification et la souffrance ; et nous, sans nous inquiéter de ses volontés, nous nous sommes laissés conduire par l'amour-propre, cherchant en tout à nous satisfaire, et refusant de nous mortifier et de souffrir.

    C'est l'exemple des mondains qui nous a entraînés ; nous avons été téméraires et coupables, en ne fuyant pas leur société pernicieuse, leurs maximes et leurs exemples corrompus.

    Ah ! tendre Père, souvenez-vous que nous vous appartenons ; attirez-nous à votre suite, et donnez-nous la grâce de vous imiter et de mépriser les railleries comme les belles paroles de ceux qui ne vous suivent pas.

    Que votre conduite soit notre lumière, et que votre grâce nous donne la force de triompher de notre volonté propre pour suivre uniquement celle de voire Père, qui nous aime et qui ne peut nous tromper.

    O Vierge très-sainte, trône de la vraie sagesse, venez à notre aide parmi tant de dangers, et inspirez-nous la générosité nécessaire pour marcher dans une voie tout opposée à celle de ce monde aveugle, afin que nous ne soyons point déçus et obligés de nous repentir, quand il n'en sera plus temps.

    Exemple.

    Saint Jean de Dieu, voyageant de Gibraltar à Grenade, rencontra sur sa route un petit enfant d'un très bel aspect, mais couvert de haillons et marchant pieds nus sur la glace Cette vue l'attendrit, et comme il n'avait point d'autre moyen de transport, il lui offrit de le prendre sur ses épaules. 

    Il se met donc à genoux et prend l'enfant qui accepte ce secours charitable.

    Cependant, chemin faisant, le poids de l'enfant devenait si lourd que le saint ruisselait de sueur.

    De temps à autre, l'enfant lui essuyait le front.

    Après un assez long trajet, Jean demanda à l'enfant de se reposer un peu et de pouvoir aller étancher sa soif a une source qui était au voisinage.

    L'enfant accéda volontiers à son désir et le saint se dirigea vers la fontaine.

    Cependant une voix l'appelle par son nom : Jean ! Jean ! il se retourne et voit le même enfant, non plus sous cet extérieur pauvre, mais tout éclatant de lumière, qui lui montre une grenade surmontée d'une croix, et qui lui dit : Jean, vous trouverez une croix à Grenade ; et cela dit, il disparut aussitôt.

    Jean se mit alors à verser des larmes, parce qu'il avait reconnu trop tard que cet enfant était Jésus lui-même.

    Cependant il tira profil de l'avis qu'il en avait reçu, et s'en alla plein de courage à Grenade, où il souffrit volontiers toutes les traverses pour le service de son Dieu et des pauvres.

    Pour hommage de ce jour, baisez cinq fois les pieds au saint Enfant, en lui disant chaque fois : que votre volonté soit faite.

    La vénerable sœur Catherine, de Saint Augustin, au Canada, ayant un jour reçu l'enfant Jésus des mains de la sainte Vierge, l'Enfant lui ordonna de demander ce qu'elle désirait. Elle se borna à lui dire : que votre volonté soit faite.

    (La prière jaculatoire comme au XXIe jour. — Le reste des exercices comme au Ier jour.)

    XXVIe jour

    JÉSUS SE REND A NAZARETH.

    I. Enfin les saints voyageurs arrivèrent à Nazareth, où on les revit, dit saint Bonaventure, avec une grande satisfaction. En effet, c'est une grande consolation pour les justes de voir s'augmenter le nombre des bons.

    II. C'est de Nazareth que Jésus a tiré le nom de Nazaréen, prédit par les prophètes. Ce nom marquait qu'il aurait ravi les cœurs comme une belle fleur charme les yeux. Malheur à nous, si nous sommes insensibles à une si grande beauté.

    III. A mesure que Jésus avance en âge, il laisse paraître une sagesse toujours plus remarquable. Oh ! si nous pouvions savoir la vie qu'il a menée et en goûter les leçons. Nous saurons tout cela un jour, mais alors aussi nous serons jugés sur la vie que nous aurons menée nous-mêmes.

    Prière.

    O très-aimable Jésus, vos vertus et votre sainteté nous montrent que vous êtes véritablement la fleur de Nazareth.

    Les charmes et les douceurs de votre bonté devraient gagner nos cœurs et nous attacher à l'imitation fidèle de vos exemples.

    Mais hélas ! les choses de la terre nous distraient; nous nous perdons à les poursuivre, et nous ne songeons pas à marcher sur vos traces.

    Ah ! quand viendra le temps, Seigneur, où nous nous résoudrons à vivre uniquement pour vous et à ne chercher que vous. Vous avez le pouvoir de faire que ce soit dès ce jour même ; vous ne manquez pas de moyens pour cela.

    Nous voici donc prosternés à vos pieds, vous conjurant de nous inspirer tant d'estime et d'amour pour vous que rien au monde ne soit capable de nous toucher et de nous plaire.

    C'est ainsi qu'avec votre grâce, nous ferons chaque jour de nouveaux progrès dans la vertu, que nous nous rendrons plus chers a vos yeux et plus édifiants pour le prochain, comme c'est votre désir.

    De cette manière, les justes seront consolés, en nous voyant semblables à des plantes précieuses, tout ornés de vertus et de mérites.

    O Marie, daignez cultiver vous-même ces plantes jusqu'ici stériles, afin que nous produisions des fleurs et des fruits en saison pour la gloire de notre divin maître.

    C'est son unique but en nous donnant et en nous conservant l'existence.

    Exemple.

    Le bon Jésus se fit connaître un jour, sous le nom de Nazaréen, à saint Edmond d'Oxford, qui était fort dévot à la sainte Enfance.

    Il allait un jour en société se promener à la campagne.

    Mais craignant jusqu'à l'ombre du péché et d'ailleurs très ami de l'oraison, peu a peu il se retira à l'écart dans une prairie, et se mit a méditer et à exhaler les saintes affections de son âme, tout en se promenant.

    Tout à coup il rencontre un petit enfant très-gracieux qui le salue avec beaucoup d'affabilité.

    Surpris de cette vue, Edmond se met a penser quel pouvait être cet enfant, et ne songea pas à lui rendre le salut.

    L'enfant lui demanda alors s'il le connaissait ; Edmond lui ayant répondu que non, il repartit avec surprise que pourtant il était toujours à ses côtés, en classe et partout.

    Mais, ajouta-t-il, si vous voulez voir qui je suis, lisez sur mon front.

    Le saint regarda, et vit écrit sur son front en caractères d'or : Jésus de Nazareth, Roi des juifs.

    Il lui ordonna de se signer chaque soir le front, en l'invoquant sous ce nom, et lui dit qu'il l'aurait délivré de la mort imprévue.

    Là-dessus, le divin Enfant disparut, en laissant Edmond pénétré d'une douceur ineffable.

    Cependant le pieux Edmond tira grand profit de l'invocation du nom de Jésus de Nazareth ; il s'en servit pour combattre l'ennemi du salut qui, lui étant apparu, voulait l'empêcher de faire le signe de la croix, et qui lui avoua que le nom de Jésus avait une force irrésistible contre ses tentations.

    L'hommage de ce jour consistera a mortifier notre vue.

    En cheminant par les rues, nous tiendrons les yeux baissés, en pensant que Jésus de Nazareth nous demande cette fleur, comme il la demanda un jour à la vénérable sœur Anne de Saint-Augustin, carmélite, en lui apparaissant sous la forme d'un enfant, pendant qu'elle se promenait au jardin.

    Oraison jaculatoire de la vénérable sœur Isabelle Sanchez, du tiers ordre de Saint-François.

    Que tous les hommes, ô Jésus, vous aiment, vous servent et vous louent. (Le reste des exercices comme au Ier jour.) 

     

    XXVIIe JOUR.

     VIE DE L'ENFANT JÉSUS A NAZARETH.

    I. La prière fut toujours l'occupation la plus douce et la plus habituelle de l'enfant Jésus, et qui nous dira avec quelle ferveur et quelle humilité il s'y livrait ! Voilà l'école de la vraie piété.

    II. Jésus aidait aussi sa sainte Mère dans les travaux domestiques, même les plus vulgaires, comme le dit saint Bonaventure. Oui, les humbles cherchent toujours à s'abaisser, et ils aiment mieux servir que d'être servis.

    III. Enfin Jésus partageait les labeurs de saint Joseph, et ne cessait de mériter ainsi pour nous. Et nos occupations ont-elles quelque mérite pour l'autre vie ?

    Prière.

    Aimable Seigneur, lorsque nous nous mettons en prière, nous venons a vous pour nous entretenir avec vous ; et lorsque nous allons en votre nom au travail, vous venez nous assister et nous bénir.

    Malheureux est donc l'homme qui perd inutilement le temps ; plus malheureux encore celui qui l'emploie à pécher.

    Le temps que vous nous donnez et qui nous échappera si vite, ne doit pas s'user de la sorte.

    Si nous l'employons d'une manière utile et vertueuse, nous aurons tout sujet de nous en applaudir.

    Nous recourons donc à vous, ô bon Père, afin que vous nous accordiez le don du recueillement, pour que nous soyons tout à vous dans la prière, et que même au milieu de nos occupations, nous ne cessions de penser à vous avec affection et amour.

    Ah ! par pitié, préservez-nous de cette dissipation qui est si nuisible à l'âme, et rendez-nous fervents dans votre service.

    Et vous, très-sainte Vierge, obteneznous l'amour du travail, et faites que nous nous appliquions à tous nos devoirs avec une intention droite. Ainsi soit-il.

    Exemple.

    Deux pieuses demoiselles vivaient ensemble, unies par les liens d'une sainte amitié.

    Après avoir donné quelque temps aux exercices de piété, elles s'appliquaient au travail des mains, dans la pensée que de même qu'une eau stagnante finit par se corrompre, de même le corps qui reste dans l'inaction porte au vice.

    Pendant qu'elles travaillaient, sans s'inquiéter des vaines nouvelles du monde, elles s'encourageaient mutuellement par des entretiens spirituels ; et pour se souvenir du Seigneur qui a promis dans l'Evangile d'être au milieu de ceux qui conversent chrétiennement, elles plaçaient au milieu d'elles un coussin, et se figuraient y voir l'enfant Jésus assis.

    Or, en effet, l'aimable Sauveur voulut un jour leur témoigner sa satisfaction et son amour.

    Il leur apparut donc et vint se poser au milieu d'elles sur le coussin qui lui était destiné.

    Etonnées au premier moment d'une visite si précieuse, et ne se possédant plus de joie, elles voulurent se jeter à ses pieds ; mais le petit Jésus ne le leur permit pas, et leur enjoignit de continuer leur travail qui lui était fort agréable à tous égards.

    Il daigna s'entretenir familièrement avec elles, se tournant avec bonté, tantôt vers l'une, tantôt vers l'autre, et les encourageant à persévérer dans la vertu, dans l'application au travail, et dans l'éloignement des vanités de ce monde aveugle.

    Au bout de quelque temps il disparut à leurs regards, les laissant pénétrées d'une consolation et d'une ferveur indicible.

    Comme hommage de ce jour, ayez soin de voiler ou de mettre en pièces les figures peu modestes, surtout les images de Jésus et de Marie qui n'auraient pas toute la décence convenable.

    C'est ainsi que la servante de Dieu, Marie-Catherine Corsini, de Modène, brisa un bel enfant Jésus, sculpté par Lucas, parce qu'il n'était pas suffisamment couvert ; elle en fit voiler un autre par un bon peintre.

    (La prière jaculatoire du jour précédent. — Pour le reste des exercices, voyez à la fin du Ier jour.)

     

    XXVIIIe JOUR.

    CONDUITE DE L'ENFANT JÉSUS ENVERS 
    LE PROCHAIN.

    I. Jésus enfant avait un maintien si bien composé qu'il inspirait le respect et l'amour. Oh ! quelle grande prédication c'est qu'un extérieur composé et modeste !

    II. Les discours de Jésus ne respiraient que suavité et sagesse. Sa jeunesse ne faisait qu'y ajouter un charme ravissant. Oh ! comme une âme maltresse d'elle-même, gouverne bien sa langue !

    III. Bien que la divinité de Jésus fût comme voilée, il ne laissait pas, en conversant, de calmer les âmes troublées qui s'adressaient à lui. Voilà le Dieu des consolations, heureux celui qui recourt à lui.

    Prière.

    Très-doux Jésus, quel ne fut pas le bonheur de ceux qui, recourant a vous dans leurs désolations et leurs peines, ont puisé dans votre vue et dans vos entretiens une consolation et un remède à leurs maux.

    Vous n'avez pas cessé d'être la source de toute douceur et le refuge des affligés ; il suffit donc que nous venions à vous avec humilité et confiance dans nos besoins ; et selon la promesse que vous nous avez faite dans l'Evangile, nous trouverons auprès de vous le calme et la sérénité.

    Mais, hélas ! au lieu de chercher la paix, là où elle est, c'est-à-dire dans votre charité et votre clémence, nous nous sommes tournés jusqu'ici vers les créatures ; aussi avons-nous été cruellement trompés dans notre attente.

    Ah ! faites qu'éclairés par l'expérience, nous agissions à l'avenir d'une manière plus sensée ; et lorsque les tribulations dont cette vie est remplie, viendront à fondre sur nous, faites que nous allions en chercher le remède auprès de vous, en nous abandonnant à votre sainte volonté.

    Marie, Mère de la consolation, soyez notre avocate dans tous nos besoins ; Jésus qui veut vous contenter en toutes choses, ne saurait rien refuser à vos prières.

    Exemple.

    Le vénérable frère François, religieux de Sainte-Térèse, et très dévot au saint Enfant, avait coutume, aux fêtes de Noël, de préparer un excellent repas pour les pauvres, sans aucun égard pour la dépense.

    Un jour qu'il retournait de Madrid à Alcala, il rencontra à peu de distance de cette dernière ville un paysan qui conduisait une paire de bœufs.

    Désireux d'avoir un de ces deux bœufs pour son repas de Noël, il pria le paysan de le lui vendre.

    On tomba d'accord sur le prix , el le serviteur de Dieu le solda sur-le-champ, en chargeant le villageois de loi amener son bœuf quatre jours avant Noël ; après quoi il se remit en chemin.

    Le villageois se rit de la simplicité de ce frère, qui, sans écrit et sans témoin, lui avait laissé son argent entre les mains ; il résolut donc de le lui escamoter.

    Cependant la fête de Noël approche, et les compagnons du serviteur de Dieu le pressent de procurer la viande dont on avait besoin pour les pauvres.

    Pour lui, plein de confiance dans le saint Enfant, il répondit qu'il y avait pourvu, et qu'on pouvait compter sur la provision.

    La veille de Noël arrive, et rien ne paraissait, lorsque tout à coup le bœuf en question arrive à pleine course.

    Reconnu par le serviteur de Dieu, il est aussitôt immolé.

    Un instant après, arrive tout haletant notre villageois ; il réclame son bœuf.

    François va au devant de lui, et le paysan se jetant à ses pieds, lui confessa le mauvais dessein qu'il avait conçu.

    Il lui raconta ensuite que le matin même, étant allé pour attacher au joug le bœuf vendu, cet animal, quoique fort doux, s'était irrité, et que s'échappant de ses mains, il s'était enfui au pas de course vers Alcala, et qu'il n'avait pu le rejoindre.

    Alors François lui mit la main sur la tête avec un grand sentiment d'affection ; il l'exhorta à reconnaîtra sa faute, et il le conduisit aux pieds du saint Enfant pour lui en demander pardon.

    Pour hommage de ce jour, tâchez de consoler une personne affligée, ou bien recommandez-là à Jésus enfant, en disant trois fois le Pater.

    Le vénérable père Dominique, religieux cistercien, en consola un bon nombre, en obtenant pour elles du saint Enfant Jésus, des grâces très-signalées, soit pour le corps, soit pour l'âme.

    (La prière jaculatoire comme avant-hier. — Pour le reste des exercices, voyez à la fin du 1er jour.)

    XXIXe jour

    JESUS VA A JÉRUSALEM. IL Y EST PERDU 
    PAR SES PARENTS.

    I. Archélaüs régnait à Jérusalem. Cependant la sainte famille ne laisse pas de s'y rendre, selon l'ordonnance de la loi, pour la fête de Pâques. Oh ! quand on craint Dieu, toute autre difficulté ou crainte s'évanouit.

    II. Jésus assiste avec ferveur aux saints offices pendant les sept jours que dure la solennité. Et nous, nous nous lassons après le moindre bien accompli.

    III. Après la fête, Marie et Joseph retournèrent, comme dit le vénérable Beda, dans deux compagnies différentes, et voilà comment ils perdirent Jésus sans qu'il y eut de leur faute. Quand nous le perdons, la faute en est à notre tiédeur.

    Prière.

    La seule crainte d'avoir perdu son fils, rendait la mère du jeune Tobie inconsolable.

    Oh ! combien ne devrions-nous pas pleurer, nous, oh ! notre doux Sauveur, sachant que nous vous avons perdu par le péché, et perdu par notre faute ?

    Ah ! du moins, puissions-nous concevoir une partie de la douleur que ressentirent votre mère et saint Joseph, lorsqu'à l'âge de douze ans, vous vous êtes éloigné d'eux et avez été perdu a Jérusalem, à leur insu et sans aucune faute de leur part.

    Ils connaissaient bien la grandeur du trésor qu'ils avaient perdu ; c'est pourquoi ils ne pouvaient s'empêcher de verser des larmes.

    Ah ! si nous le comprenions comme eux, nous en verserions de bien amères.

    Ah ! faites-nous apprécier la grandeur de notre perte, et inspirez-nous la plus vive sollicitude pour vous retrouver.

    Si déjà nous vous avons recouvré par la pénitence, ne souffrez pas que désormais, nous nous exposions au danger de vous perdre de nouveau, en nous refroidissant dans votre saint service.

    Vous êtes tout notre bien, et nous consentons à perdre tout le reste, plutôt que de vous perdre une seconde fois.

    Sainte Vierge, vous qui avez été si affligée de la disparition de Jésus, faitesnous part de votre douleur, afin qu'un jour nous puissions jouir a jamais dans votre compagnie de la douce présence de notre bien-aimé Jésus.

    Exemple.

    La bienheureuse Jeanne de la croix, religieuse franciscaine, avait toujours présent à l'esprit le saint enfant Jésus, et quel que fut son office, elle se figurait qu'elle le servait et l'assistait.

    Or, en tournant un jour la roue au parloir en qualité de portière, elle y trouve à l'improviste son bien aimé.

    Aussitôt elle veut le prendre dans ses bras, mais la sainte Vierge lui apparaissant ne le lui permit pas.

    Ce fut là pour Jeanne une privation bien sensible : mais la Mère des miséricordes lui dit pour la consoler : Jeanne, allez au jardin et là vous nous retrouverez. Jeanne y courut, et les ayant effectivement retrouvés, elle fut ravie hors d'elle-même de cette douce vision, sans plus s'apercevoir que la clochette de la porte la rappelait à son poste.

    Marie la réveilla : Va, lui dit-elle, ma fille, accomplir le devoir de l'obéissance ; car on t'a appelée.

    Jeanne obéit, et ayant rempli son office, elie revint là où elle avait laissé son cœur, et y revit comme auparavant Jésus et Marie.

    L'humble religieuse ne put s'empêcher de leur dire combien elle était confuse qu'ils l'eussent attendue tout ce temps.

    Mais la divine Mère lui répondit qu'elle ne devait pas en être surprise, puisqu'elle les avait laissés par le seul motif de l'obéissance ; car c'est là, ajouta-t-elle, ma vertu favorite et celle de mon fils.

    En parlant ainsi, elle disparut, laissant la bonne religieuse éclairée et consolée.

    L'hommage de ce jour consistera a faire l'aumône à un enfant pauvre avec intention de la faire à l'enfant Jésus.

    Un jour, le divin Enfant parut pieds nus au bienheureux François de Pavie, lui demandant l'aumône.

    (La prière jaculatoire comme au XXVIe jour. — Pour le reste des exercices, voir la fin du Ier jour.)

    XXXe jour

    JÉSUS EST RETROUVÉ DANS LE TEMPLE.

    I. Extrême fut la peine des saints pèlerins, en s'apercevant qu'ils avaient perdu Jésus. Hélas ! il y a bien peu d'hommes qui s'affligent d'avoir perdu leur Dieu par le péché.

    II, Après l'avoir cherché inutilement parmi leurs connaissances, enfin ils le découvrent dans le temple au milieu des docteurs. Oh ! quelle consolation, quelle joie quand une âme retrouve son Dieu !

    III. Jésus donna à sa Mère la raison de son séjour prolongé à Jérusalem. Il lui dit qu'il en avait ainsi agi dans l'intérêt de la gloire de son Père. Quand il s'agit de la gloire de Dieu, il faut être insensible à tout le reste.

    Prière.

    0 Dieu, rédempteur de nos âmes, que nous sommes tristes de voir tant de pauvres pécheurs, éloignés de vous, qui ne s'affligent pas de vous avoir perdu, qui ne cherchent pas à vous retrouver, et qui au contraire, se réjouissent dans le mal, et s'étudient à s'éloigner de plus en plus de vous qui êtes la source unique de tout bien et la véritable vie de notre cœur.

    Insensés qu'ils sont, ils ne vous cherchent pas ; mais vous, qui êtes un Père infiniment miséricordieux, tirez-les de l'abîme de misère dans lequel ils se sont précipités.

    Que la lumière de la foi leur fasse connaître où se trouve la vraie paix du cœur, et combien il est triste et amer pour eux de vous avoir quitté.

    Inspirez-leur le courage de se résoudre a une conversion sincère, donnez-leur la grâce d'exécuter en effet ce dessein salutaire.

    Ils en seront heureux, et vous-même vous en serez joyeux.

    Cette conversion fera leur bonheur et votre gloire.

    0 très-sainte Vierge, vous qui êtes le refuge des pécheurs, conduisez-nous, malheureux que nous sommes, aux pieds d'un bon ministre du Seigneur dans son saint temple, et là faites-nous retrouver le Dieu des consolations que nous avons perdu par le péché.

    Exemple

    Le grand serviteur de Dieu, le père Jules Mancinelli, jésuite, fut éprouvé par le Seigneur, pendant un mois entier, par des désolations et des ténèbres d'esprit telles qu'il lui semblait être sans Dieu, et qu'il doutait s'il était dans sa grâce.

    Au milieu de ces angoisses, il ne laissait pas de faire beaucoup de prières et de pénitences, il ajoutait même a ses exercices accoutumés, afin de toucher le Seigneur de compassion,

    Or, voici qu'un matin, au point du jour, il vit l'enfant Jésus tout environné de gloire et de lumière qui le regarde fixement d'en haut.

    A peine le bon père eut-il reconnu celui qui venait le visiter, qu'il se lève en toute hâte, et que s'humiliant devant son divin Rédempteur, il le conjure de daigner l'accepter pour son serviteur, sans dire un seul mot des angoisses qu'il souffrait.

    Il obtint plus qu'il ne demandait.

    Le saint Enfant descendit jusqu'à lui, embrassa étroitement son serviteur, le consola, et lui fît ressentir une confiance et une paix vraiment céleste.

    La vision ayant disparu, il demeura plein de confiance d'être en grâce avec le Seigneur et de lui plaire par le genre de vie qu'il menait.

    Il continua donc à servir fidèlement son Dieu qui avait daigné l'encourager de la sorte, et qui dans la suite ne cessa pas de l'assister, mais spécialement au moment de son précieux passage à l'Eternité.

    Pour hommage de ce jour, récitez les bras en croix le petit chapelet de l'enfant Jésus qui consiste en trois Pater, en l'honneur de la sainte famille, et en douze Ave, en l'honneur des douze années de la sainte enfance de Jésus-Christ.

    Instituée par la vénérable sœur Marguerite de Bona, cette dévotion a produit les plus grands fruits.

    (L'oraison jaculatoire du XXVIe jour. — Pour le reste des exercices, voyez la fin du Ier jour.)

    XXXIe jour

    JÉSUS EST LE BON PASTEUR.

    I. Jésus aime ses brebis, c'est-à-dire les âmes qui le suivent et qui lui obéissent. Avec quelle charité il les gouverne, les assiste et les nourrit ! heureuse l'âme qui lui est fidèle.

    II. Par sa grâce et sa vertu, Jésus délivre ses brebis des ennemis invisibles qui cherchent comme des loups a les dévorer. Heureux celui qui met sa confiance en lui et qui l'invoque.

    III Jésus secourt ses brebis dans leurs besoins ; solitaires, il les caresse ; perdues, il les cherche ; malades, il les guérit ; fidèles, il les couronne. Heureux celui qui prête l'oreille à sa voix et qui a recours à lui.

    Prière.

    O Jésus, ô le bon pasteur, voici les brebis de votre bercail, qui vous sont si chères malgré leur ingratitude.

    Oh ! quel n'est pas notre bonheur de nous trouver en si bonnes mains ! quel autre pourrait nous secourir et nous sauver ? Quel autre a comme vous une puissance et une bonté infinies ?

    Oui, cette charité qui nous a attendus avec tant de patience et recherchés avec tant de sollicitude, cette charité achèvera son œuvre en nous rappelant à une vie digne de votre amour, et telle que nous puissions mourir contents et paisibles.

    Si la douceur de votre conduite ne triomphe pas de la dureté et de l'indifférence de nos cœurs, usez de rigueur, et frappez-nous de peur que nous ne devenions la proie de nos ennemis et que nous ne périssions éternellement.

    Souvenez-vous combien nos âmes vous ont coûté et combien vous avez fait et souffert pour elles. Vous êtes tout-puissant ; triomphez de nous par votre grâce, et le ciel dans la jubilation vous glorifiera de cette grande miséricorde.

    Très-sainte Vierge, nous sommes les brebis de votre Fils ; souffrez que nous vous suppliions de prendre soin de nous et de nous secourir.

    Exemple.

    La vénérable sœur Marie-Anne, du tiers ordre de Saint-François, s'était dévouée avec beaucoup de charité, pour l'amour de Dieu, au service des personnes malades de son sexe, à Tolède.

    Un jour, elle voit apparaître son bien-aimé, vêtu en berger, portant une brebis sur ses épaules, et tenant à la main une houlette surmontée d'une belle croix.

    Son visage était tout enflammé et baigné de sueur.

    La servante de Dieu, attendrie à cette vue, confessa a son bon pasteur qu'elle était la cause de sa fatigue, et cette brebis perdue qu'il avait cherchée et qu'il caressait avec tant d'amour.

    Console-toi, ma fille, lui répondit le Sauveur avec bonté, parce que ton Père et ton pasteur est venu à ta recherche.

    Oh ! combien je suis affligé de la perte de ces âmes que j'appelle par mes douces inspirations, et que je frappe par les adversités, mais qui ne veulent pas se rendre, ni revenir entre mes bras !

    A de si justes plaintes, Marie-Anne se sentait évanouir. Alors le bon Pasteur se mit à s'asseoir; ayant déposé la brebis sur ses genoux, il se mit à chanter avec quelle joie il avait travaillé et souffert pour le salut des âmes.

    La vision dura sept heures qui ne parurent qu'un moment à Marie-Anne.

    Une de ses compagnes la surprit, ayant le visage tout embrasé et tout trempé de sueur, malgré qu'elle se tînt à genoux en plein air, et que la neige tombât en abondance.

    L'hommage de ce jour consistera à nous tenir éloignés du feu et à souffrir quelque temps le froid pour la conversion des pécheurs.

    Le père Bernardin Réalino, jésuite, était tout engourdi de froid d'avoir passé toute la nuit au confessionnal, en plein hiver.

    Le divin pasteur lui apparut, et le réchauffa entre ses bras.

    Oraison jaculatoire de saint Jean de la Croix.

    Votre amour, ô Jésus, me fait mourir. (Le reste des exercices comme au Ier jour.)

     

    Ier FÉVRIER.

    FRUIT DE LA DÉVOTION ENVERS L'ENFANT 
    JÉSUS.

    I. L'amour que Jésus nous témoigne au milieu de tant rie souffrances, nous oblige à lui être reconnaissants. Soyons donc fidèles aux résolutions que nous avons prises pendant ce mois.

    II. L'amour que Jésus nous a marqué par tant de lumières et de grâces qu'il nous a accordées, mérite d'être payé par l'amour. Détachons-nous donc de tout, pour nous vouer tout à lui.

    III. L'amour que Jésus a pour ceux qui l'honorent, nous engage à avoir confiance en lui et à recourir à sa bonté. Prions-le donc beaucoup et avec foi.

    Prière.

    Très-aimable enfant Jésus, ce serait peu de vous donner notre sang et notre vie, après tant d'obligations que nous vous avons pour tout ce que vous avez souffert dès votre enfance pour notre avantage et par amour pour nous.

    Mais votre bonté agrée et accepte, même un verre d'eau froide donné en votre nom.

    Nous espérons donc que vous regarderez d'un œil de miséricorde les hommages que nous avons tâché de rendre à votre sainte Enfance pendant ce mois.

    Il est vrai, nous avons souvent manqué de ferveur, et nous vous en demandons pardon du fond de notre cœur ; mais nous nous réjouissons à la pensée que tant d'autres âmes qui vous sont chères, ont suppléé à notre froideur et vous ont honoré avec fidélité et affection.

    Ah ! augmentez en elles votre amour, et faites que nous aussi, nous en soyons tout embrasés pour v otre bonté infinie.

    Comme gage du désir sincère que nous avons d'être désormais pleins de ferveur dans votre service, acceptez la résolution que nous vous offrons de mépriser et de fuir à l'avenir les joies vaines et pernicieuses du monde, votre ennemi.

    Faites que tous en connaissent la vanité et le néant, en sorte qu'ils ne daignent pas même y arrêter leur pensée, encore moins leur cœur, pour se donner tout à vous, qui seul pouvez les rendre heureux et contents.

    Vierge sainte, recevez-nous sous votre protection, et faites que n'ayant, d'autre ambition que de servir votre Fils, nous méritions ses bénédictions éternelles, et qu'ainsi nous puissions un jour aller le bénir avec vous dans le ciel. Ainsi soit-il.

    Exemple.

    Les carmélites de Beaune, en France, avaient appris à honorer la sainte enfance de Jésus, au moyen du petit chapelet établi par leur vénérable sœur Marguerite du très-saint Sacrement.

    Chacune d'elles attendait quelque grâce particulière de cette pieuse pratique.

    Or, un jour, la sœur Marguerite étant ravie en extase et tout éclatante de lumière, ses consœurs qui s'aperçurent de la chose, lui mirent sur la tête leurs petits chapelets.

    Elles espéraient que, par ses mérites, elles obtiendraient plus facilement les grâces qu'elles sollicitaient, ou bien qu'elle-même leur obtiendrait du saint Enfant ce qu'elles désiraient.

    La servante de Dieu revint enfin à elle et se vit chargée des chapelets de toutes ses consœurs.

    Ce qu'il y eut de plus merveilleux, c'est que le Seigneur lui ayant découvert les secrets intérieurs de chacune d'elles, elle se mit à leur dire à toutes la grâce particulière que le saint Enfant se proposait de leur accorder en récompense de leur dévotion.

    Les effets prouvèrent que ce n'était pas une illusion, mais une révélation véritable.

    C'est ainsi que le saint Enfant témoigna combien il amie, et avec quelle libéralité il sait récompenser la dévotion envers sa sainte Enfance.

    Comme hommage de ce jour, offrez au saint Enfant, pendant l'Elévation, !a résolution de ne prendre aucune part aux divertissements insensés du carnaval.

    L'enfant Jésus apparut à la sœur Isabelle de Moreggiore, et lui dit avec bonté : Persévérez comme vous avez commencé ; parce que c'est à la persévérance qu'est due la couronne.

    (La prière jaculatoire du XXVIe jour. — Le reste des exercices comme à la fin du Ier jour.)

     

    CONCLUSION.

    On pourra terminer ces exercices, le jour de la purification de la très-sainte Vierge, en s'approchant des sacrements de pénitence et d'Eucharistie, ou bien encore en habillant un enfant pauvre de cinq à six ans.

    Un jour que saint Jean de Dieu faisait oraison dans l'église de Notre-Dame de la Guadeloupe, la divine Marie vint à lui, et déposa son saint Enfant entre ses bras ; puis elle lui remit quelques petits langes, en lui enjoignant d'en envelopper le corps de Jésus.

    Par cette vision, elle voulait lui apprendre avec quelle foi et quelle charité il devait s'appliquer à vêtir les pauvres.

    Ayant donc fait choix d'un enfant pauvre, on le dépouille à l'écart de ses vêtements, et on le couvre décemment d'un manteau.

    Cette cérémonie faite, on se met à genoux devant l'image de l'enfant Jésus, et on récite la prière suivante :

    O très-saint enfant Jésus, qui avez daigné naître pauvre par amour pour nous, vous nous avez dit dans le saint Evangile que vous réputeriez fait à vous-même ce qu'on ferait en faveur du plus petit d'entre vos pauvres.

    Agréez donc comme un hommage à votre personne sacrée la charité que nous allons faire à ce petit enfant.

    Nous lui lavons les pieds, vous priant de laver en même temps nos cœurs ; nous revêtons ses membres, pour que vous revêtiez nos âmes de toutes les vertus.

    Nous nous offrons tons a vous par les mains de la très-sainte Vierge et. de saint Joseph ; permettez-nous d'attendre en retour cette bénédiction que vous avez promise pour le jour du jugement à ceux qui vous honorent et qui vous couvrent dans la personne des pauvres.

    Après cette prière, on habille le petit pauvre en chantant un cantique, et avant de lui mettre ses chaussettes et ses souliers, on lui lave les pieds avec de l'eau chaude et parfumée.

    Ensuite on récite les douze degrés de la sainte Enfance (voyez en tête de cet opuscule), avec l'oraison qui y est jointe.

    Si on ne fait pas cette cérémonie, on y supplée par le chant d'un cantique, après lequel on récite la prière suivante. On y joint les douze degrés de la sainte Enfance, pratique qu'on pourra observer jusqu'au carême.

    Très-aimable Seigneur Jésus-Christ qui, devenu petit enfant pour nous, avez voulu naître dans une étable pour nous délivrer des ténèbres du péché, pour nous attirer à vous, et pour nous embraser de votre saint amour, nous vous adorons et nous vous remercions avec toute la cour céleste ; nous vous reconnaissons pour notre créateur et notre rédempteur; nous vous choisissons et nous vous proclamons comme notre roi et notre Seigneur, et comme tribut de soumission, nous vous offrons toutes les affections de notre pauvre cœur.

     

     

    O bon Sauveur, daignez accepter cette offrande, et pour qu'elle soit digne de vos regards, pardonnez-nous, éclairez-nous, et enflammez-nous de ce feu sacré que vous êtes venu apporter au monde, et dont vous désirez que nos cœurs soient embrasés.

    Puisse notre âme devenir comme un holocauste perpétuel en votre honneur; qu'elle cherche toujours votre plus grande gloire sur la terre, et qu'ainsi elle mérite d'aller jouir un jour de votre beauté infinie dans le ciel.

    Et vous, très-sainte Vierge, mère de Jésus et notre tendre mère, de concert avec saint Joseph votre époux, priez pour nous le saint enfant Jésus, afin qu'il nous exauce et nous sauve. Ainsi soit-il.

    Enfin, on baise les pieds du saint enfant Jésus, en signe qu'on se consacre à lui pour toujours.